Une seule commune, en FRANCE, s'appelle HENVIC, village de 1500 habitants,
situé à 12 kms, au Nord- Ouest de MORLAIX, dans le Nord du
Finistère.
C'est dans ce village, dans une maison, située en face de la
nouvelle église, que je suis né, le 27 Mai 1921, entouré
de ma mère, née Marie Yvonne PENVEN, mon père MARZIN
Yves, mon frère Joseph (né le 20-11-1913), ma grand- mère
maternelle Marie Louise, née LE DUC, et veuve de mon grand-père
PENVEN.
Dans les délais légaux, mon père me déclara
à la mairie, et je fus prénommé Yves, comme lui.
Les garçons naissent dans les choux, d' après nos grand-mères,
interrogées sur ce délicat problème. En ce qui me
concerne, ce devait être un chou-fleur, car le village en produit
à profusion, ainsi que les artichauts et les primeurs.
Une autre caractéristique du village, c'est la proximité
de la mer: CARANTEC, St POL DE LEON et ROSCOFF sont en vue.
En 1923, ma mère, mon frère et moi, quittons la FRANCE
métropolitaine, via MARSEILLE, pour rejoindre, en bateau, notre
chef de famille, Second -maître canonnier à ORAN, en ALGERIE.
Peu de souvenirs de cette période de deux ans: le tir de gros
canons de marine, en exercice, et notre chien (qui me paraissait bien gros),
tout au plus.
En 1925, nous sommes de retour en BRETAGNE, et, plus précisément,
à HENVIC.
Plus de PERE à 5 ans, plus de MERE à 7 ans, c'est désormais
ma grand-mère, qui va s'occuper de moi, et ADMIRABLEMENT." Compte
sur toi, et encore!", aura été l'un de ses meilleurs conseils,
que j'ai strictement suivis, toute ma vie. Comme elle avait raison !
Dés ses treize ans, certificat d'études primaires en
poche, mon frère JO, entre, comme apprenti pâtissier, chez
Mr GUILLOU, à St POL DE LEON, à 8 kms (et que nous apercevons,
de notre fenêtre). Dès qu'il est libre, il prend sa bicyclette
et, passant par le Pont de la Corde (à péage), il vient se
reposer à HENVIC.
De mon côté, je travaille de mon mieux, à l'école
communale, guidé par une institutrice, puis un instituteur, hors
pairs. La première, m'aura fait copier , cent fois, la table de
multiplications par 4, que je ne savais pas très bien. Le lendemain,
non seulement je la savais, mais aussi la table par cinq. Merci Madame
GUILLERM. Monsieur GUYOMAR, lui, a réussi à me faire passer
brillamment, à treize ans, le certificat d'études primaires,
avec mention bien, à TAULE, canton voisin, situé à
4 kms.
En dehors de l'école, je demeure donc, en permanence,
avec ma grand-mère, qui tient un bistrot, mais vend également,
de la confiserie et un assortiment de sabots de bois, et de galoches réputées.
Longtemps, avec mes deux mains, il m'arrive de servir les clients: vin,
apéritif, digestif, bière, sodas et même champagne
breton : (Rhum et limonade).
J'aide ma grand-mère de mon mieux, et, toujours, avec le plus
grand plaisir.
L'un de nos meilleurs clients, est le forgeron voisin. (Mitoyen). Il
marche avec une prothèse, ayant eu un pied coupé, dans l'enfer
de VERDUN. Par lui, j'ai appris les horreurs de la guerre 14-18, et, aussi,
il faut le reconnaître, à haïr le Boche.
Nous avons un jardin potager, et nous élevons des lapins, que
nous allons, parfois, vendre au marché de St POL DE LEON. Rien de
tel, pour s'initier au jardinage, et au bricolage : (Réfection des
clapiers par exemple).
Un jour, le mari de l'institutrice, est venu nous installer l'électricité,
pour l'éclairage seulement, mais quelle révolution !
Mise en réserve des lampes à pétrole malodorantes,
et des bougies fumeuses. Désormais, les lampes-tempête ne
serviront, que la nuit, lorsqu'il faut se déplacer, pour les courses
et les visites, que nous rendons régulièrement, aux oncles,
tantes, cousins, et cousines, très, très nombreux.
Parfois, le vendredi soir, nous allons au TY-NEVEZ, chez les MARZIN.
C'est le jour, où la grand-mère, et la plus jeune des filles
de la maison, font les crêpes, (dans la cheminée, sur un grand
plateau, en étalant la pâte, avec une sorte de petit râteau).
On ne mange que des crêpes, mais quel régal ! Plus question
d'avoir faim.
Chez mon parrain PENVEN, que mes cousins appellent tonton Clauda, je
vais chercher les oeufs, le lait et surtout le beurre salé breton,
(Evidemment !) que ma marraine réussit à merveille. Ils ont
trois enfants: Joseph, Céline et Denise. Ils élèvent
également, deux vaches. Parfois, on nous les confie, pour les mener
paître, dans les champs voisins.
Comme souvenir d'oiseaux: Les alouettes, qui grimpent à la verticale,
en chantant joyeusement, pour redescendre, à toute allure, lorsqu'elles
pensent être montées suffisamment haut. J'ai beaucoup voyagé,
plus eu l'occasion d'en voir. Au CANADA, peut-être, une chanson célèbre,
en faisant une description détaillée, mais je n'y suis
jamais allé.
Si nous voulons des crevettes, nous allons à CARANTEC, où
notre tante Marie Josèphe, en pêche. Elle a la réputation,
de ne jamais revenir bredouille, connaissant ses trous d'eau, mais en en
conservant, jalousement, le secret ! Encore une famille PENVEN avec deux
enfants : Yvonne et Louisette. Le Chef de famille travaille également,
comme cantonnier, à HENVIC, parfois avec mon parrain.
Au bout de notre jardin, habite la famille LE DLUZ. Elle comprend
: tante Jeanne (née PENVEN), tonton Jean, quand il n'est pas sur
le" Triton 15", (Remorqueur basé à CONFLANS Ste HONORINE,
et tractant de nombreuses péniches sur la SEINE), dont il est le
mécanicien. Tante Jeanne cultive donc, son petit jardin, tout en
élevant une nombreuse famille: Marcelle, plus âgée
que moi d'un an, Fernande, Jean, Jeanne, Mimi et Yves.
Avec ça, la solitude, ça n'existe pas. (Un chanteur le
dira plus tard) !
A la gare: encore une famille PENVEN: tonton Jean, quand il n'est pas
sur le Triton 17, dont il est le mécanicien, tante Jeanne, avec
sa mère: tante Belle, et qui cultive son jardin, tout en élevant
: Roger, Micheline et ma filleule Suzanne.
A SAINT POL DE LEON, encore une famille PENVEN: Tonton François
qui travaille aux chemins de fer, Tante Olive et leurs enfants : Robert,
Raymond et Christiane.
Nous visitons régulièrement ces familles, à tour
de rôle, pour éviter les jalousies, et puis, ils sont tellement
contents, de voir leur mère ou grand-mère, qui apporte toujours
des bonbons !
A retenir encore, de cette période pré-teenage, (ça,
ce n'est pas du bon français!) le fait, qu'ayant été
baptisé à HENVIC, j'ai assidûment, suivi les cours
du catéchisme, dans la vieille église, située dans
le cimetière, ce qui m'a permis, de faire ma première communion,
et même d'être confirmé, par Monseigneur DUPARC, de
l'Evêché de QUIMPER.
Le curé Eucher CORRE, aurait bien aimé, que je sois enfant
de choeur. Mais grand-mère n'y tenait pas tellement, et moi non
plus. Par contre, étant réputé pour la qualité
de ma diction, j'acceptais, lors de grandes cérémonies, de
lire les noms des tués, qui figuraient sur notre monument aux morts.
A chaque nom, la foule nombreuse, en choeur, répondait" Mort pour
la France". A HENVIC, cette liste était particulièrement
longue. J'ai rarement vu un village, d'une si petite population, avoir
un monument aussi important.