OreilleG100

La Baraka d'un FFL 40



19. SAIGON

 A quai à 19 h. Quelques bateaux dans le port. Le RENA (Suède), le GLORIA (Panama), Le DAVID F. BARRY (USA), L' IKAUNA (Britannique), Le FORT BEAUSEJOUR (Britannique), le TIJUCA, le GLOIRE (France). Pas mal de monde sur le quai. Accueil chaleureux. Les deux autres batteries de FTA, sont ici. Dormons encore à bord cette nuit. Les Officiers des batteries d'ici, sont venus nous voir, alléchés par une bouteille de cognac. Ils nous ont, en contrepartie, apporté le courrier.

 7-3-46: Le débarquement des unités a commencé, dès 5 h. A 9 h 30, c'est notre tour. Ouf ! Enfin à terre. Toujours la même réaction, après un long voyage en mer. Les hommes sont installés dans un camp, situé à 500 mètres environ du port. Les Officiers sont dans des villas, situées à l'Ouest de SAIGON, seuls pratiquement, dans la nature. Déchargement du NEA HELLAS. Dans la soirée, dégagement entre Sous-officiers et Officiers, pour fêter notre arrivée. A 21 h, suis allé remplacer GLOAGUEN au port.

 8-3-46: Rentré ce matin du port, vers 3 h. A 11 h, réveil. En fin d'après-midi, suis retourné au port. Le déchargement a été terminé, à 18 h 30. Me suis fait soigner à la main, d'une écorchure importante, occasionnée hier soir, par une chute, dans un fossé. Le pied droit est également écorché, mais c'est moins grave. Quelques coups de canon, se font entendre, ce soir. D'où ? Mystère. Quelques moustiques.

 9-3-46: Au camp: travaux d'aménagement. Reprise du travail des bureaux. Payement de la solde, en piastres. (Il va falloir s'y habituer) (Une piastre vaut 17 francs). Règlements de comptes, pacifiques.

 10-3-46: Dimanche. On s'est levé assez tard, ce matin. Dans l'après-midi, promenade en voiture dans SAIGON. Secteur calme. Moins de coups de feu.

 A l'origine, nous étions venus ici, pour combattre les Japonais. Immédiatement après avoir reçu deux bombes atomiques, sur deux villes importantes, les Japonais ont reçu l'ordre de leur MIKADO, de cesser le combat. Disciplinés, ils ont OBTEMPERE. Sans arme, ils se déplacent en ordre, sous le commandement de leurs Sous-officiers et Officiers. Extraordinaire impression de DISCIPLINE. (Rien à voir avec d'autres troupes, dans la défaite). Sommes persuadés, à cette vue, que, sans la bombe atomique, la guerre aurait duré encore LONGTEMPS.

 Appuyés par la CHINE et la RUSSIE désireuses, la 1ere, à terme, d'avoir la mainmise totale économique, sur toute l'INDOCHINE, la seconde, d'évincer la FRANCE, et de disposer de bases militaires admirables, en vue de futures opérations, les partisans d' HO CHI MINH (L' Oncle HO), par idéologie, visent, tout simplement, le pouvoir TOTAL, sur toute l'INDOCHINE et pour y parvenir, seule solution: l'éviction, pure et simple, de la FRANCE.

 La FRANCE est présente ici, depuis la fin du siècle dernier, sa présence a été SOLLICITEE, par tous les Indochinois, victimes des PAVILLONS NOIRS chinois. Elle supervise une colonie: la COCHINCHINE, et quatre protectorats: l'ANNAM, le TONKIN, le LAOS et le CAMBODGE, ce dernier, souvent ennuyé par les SIAMOIS.

 Grâce aux troupes coloniales, aux Missionnaires, au Corps médical, aux enseignants et aux Gendarmes, relativement peu nombreux, mais respectés de tous, elle a accompli ici une oeuvre sensationnelle, à tel point, qu'en 46, l'INDOCHINE est le grenier à riz, de tout le Sud- Est asiatique. Toutes les minorités, refoulées dans les montagnes, par les Annamites, pouvaient, malgré tout, continuer d'exister, et se sentaient enfin protégées.

 Lutter contre le terrorisme, le totalitarisme, maintenir la LIBERTE, est désormais, la mission de l'Armée Française, dont les membres, TOUS VOLONTAIRES, (Certains, ayant dû signer, jusqu'à trois fois, pour en faire partie) acceptent, avec enthousiasme, leur nouvelle mission.

 Notre groupe est composé d'un tout petit noyau d'Européens, et d'engagés autochtones, de toutes races, de toutes les religions, parfaitement conscients de l'enjeu. La LIBERTE n'a pas de prix.

 11-3-46: Journée passée au camp. Une note de service, m'apprend, que, en tant qu'ancien de la FRANCE LIBRE, je dois bénéficier d'un rappel d' ANCIENNETE. Toujours une bonne nouvelle, puisque NON SOLLICITE ! (La régularisation, avec rappel de solde, sera effectuée en.... l963.  Aucune nouvelle pendant toute cette longue période. Lenteurs administratives, intentionnelles ? Fin 1961, en fin de carrière, j'avais, déjà, 55 annuités !

 Heureusement que je n'étais pas pressé!).

On se couche très tôt ici (22 h !).

 12-3-46: Matinée au camp. Dans l'après-midi, je suis allé sur les quais, où le SAMRICH, que je suis chargé de décharger, est arrivé, peu avant midi. Ce soir, je suis allé, avec quelques camarades, à la Batterie" A". Demain matin, je dois être, à 7 h au quai, pour commencer le déchargement.

 13-3-46: Le déchargement du SAMRICH a commencé. De 7 h à 11 h, de 13 h à 17 h, puis à partir de 19 h. Ce bateau contient surtout des camions. Des prisonniers japonais, me servent de dockers. Ils travaillent, extrêmement bien, commandés par leurs Sous-officiers et Officiers. Par l'intermédiaire de l'interprète, j'indique à leur Cdt d'Unité, le travail général demandé, puis je me contente d'observer. Si je dois faire une observation, l'interprète s'en charge, auprès du Cdt d'Unité, qui donne ses nouveaux ordres. La discipline est extrêmement poussée. Tout homme, surpris à chaparder, un malheureux paquet de cigarettes, sur le quai, est immédiatement puni (Fouetté devant tous ses camarades rassemblés).

 Je place un Sous-officier devant chaque  cale, chargé de noter, tout ce qui descend du bateau. Tous les jours, je centralise le tout et, à la fin du déchargement, on compare nos résultats, au connaissement officiel.

 Même chose en sens inverse, pour le chargement.

 Je vais passer toute la nuit sur le quai, car le déchargement doit être accéléré.

 14-3-46: Le travail s'est poursuivi, rapidement, au cours de la nuit. Ce matin, à 6 h, un tas de matériel imposant, attendait sur le quai, l'arrivée des camions. Aujourd'hui, j'ai les pieds qui brûlent. Le soleil est assez fort, l'après-midi . Je n'ai jamais été aussi bronzé de ma vie. Le bateau devant partir demain, on doit encore travailler, la nuit prochaine.

15-3-46: A 1 h 30, ce matin, je suis revenu à la villa, pour y dormir enfin quelques heures. A 7 h 30, de nouveau sur le quai.

 Le déchargement s'est terminé, à 10 h 30. Ouf ! Mais notre travail n'est pas fini. Dans l'après-midi, jusque 17 h, je suis sur le quai. Il y aura encore du travail, demain matin.

 16-3-46: Debout à 7 h, après une excellente nuit. A 8 h 30 sur le quai. Tout le matériel était déblayé à 11 h. Compte rendu de déchargement fourni à 15 h. Ping-pong, le restant de la journée. La vie tranquille reprend, jusqu'à l'arrivée d'un autre bateau.

 17-3-46: Dimanche. Réveil à 8 h. On se repose quand on peut. A 10 h, sommes allés à la messe, à la Cathédrale. Impossible d'y entrer, tellement il y avait de monde. Sortie de messe très agréable. Couleurs variées.

 18-3-46: Après une semaine de travail, assez pénible, quelques jours de repos font du bien. Passé la journée au camp, et à la villa. (Deux heures de sieste). Pour tout travail aujourd'hui, je me suis familiarisé avec le code de chiffrement et de déchiffrement. Tout est calme ici, ce soir. DOREAU est de service, au port. GLOAGUEN est chez lui.

 19-3-46: Et voici une journée de plus, passée au camp. Me suis occupé de la vérification du livre de solde.

 20-3-46: De 11 h à 13 h 30, et à partir de 17 h, je suis de permanence au transit. Travail, qui consiste à attendre, que le téléphone sonne.

 21-3-46: A 7 h 30, s'est terminé mon tour de permanence. Rien eu d'anormal durant la nuit. Matinée passée au camp. Etats sur le matériel britannique. C'est aujourd'hui le printemps. Au courant de l'après-midi, sommes allés, CARADEC, GLOAGUEN et moi, au Foyer du Soldat. Y ai acheté un colis de riz, que j'expédierai demain, à la TAVERNE ALSACIENNE de SCEAUX. (Le bienvenu, les restrictions n'étant pas terminées !).

 22-3-46: Matinée au Service cartographique. Reçu une lettre de Claude VAN GHELE, qui est au Quartier Virgile. A 13 h 30, sommes enfin ensemble, devant un verre, première fois depuis près de deux ans. A 15 h, nous avons dû nous séparer. Après-midi au camp. Ai placé dans l'album, quelques photos, prises sur le bateau.

 23-3-46: Ce matin, suis allé faire un tour, au transit. Des promotions ont eu lieu, dans le milieu Sous-officiers. Arrosage, à l'heure de l'apéritif. Dans l'après-midi, sommes allés, faire un tour en ville.

 24-3-46: Au quartier, dans la matinée. Rien de nouveau, en ce qui concerne le CEPHEE. Une vingtaine de parties de ping-pong, jusque midi. C'est mon sport favori, pour l'instant. Après-midi passée à la villa. De 18 h à 22 h 30, je suis de patrouille en ville. (Avec 1 Sous-officier et 10 hommes). Cette patrouille a consisté, à stationner, jusque 21 h 30, dans un passage couvert de l'Hôtel des Nations, dans l'attente d'un signal de bagarre. Puis à se promener en voiture, jusque 22 h 30, et vérifier que les cafés sont bien fermés.

 Les dockers du coin, s'appellent les coolies, qui se présentent au travail, quand ils n'ont plus d'argent, pour aller jouer aux jeux d'argent, en ville. (Une véritable passion).

 D'autres coolies, plus sérieux, sont spécialisés, dans la manutention des sacs de riz. Payés à la tâche, ils abattent un travail considérable, avec une dextérité extraordinaire. Le sac de riz, va exactement à sa place, sans nécessiter un temps mort, pour une quelconque rectification. Ils bénéficient d'une haute considération, dont ils ne sont pas peu fiers.

 25-3-46: Rien de nouveau au quartier, aujourd'hui. Le FORT LAJOIE est arrivé. ERIDAN part pour FRANCE (Expression d'ici).

 26-3-46: Journée passée dans l'attente du BORYSLAW. Ce soir, il est à 15 kms d'ici. Demain matin, il sera au MM2 (Messageries Maritimes), bien placé pour nous, car près du camp. Le FORT CHESTERFIELD et le CEPHEE sont arrivés.

 27-3-46: Le BORYSLAW est enfin arrivé, ce matin. Matinée occupée à prendre connaissance, de son contenu. Déchargement commencé dans l'après-midi. A 17 h, arrêt. On ne travaillera pas de nuit. Un bateau hollandais, amenant 600 hommes, est arrivé dans l'après-midi. C'est le WELTEWREDEN. C'est fou, ce qu'on peut être sale, en rentrant du port. Une douche est alors la bienvenue. Soirée normale, calme, à notre villa. Lecture, contemplation des photos, tout en sirotant un verre bien glacé. Nous sommes des vernis. Nous avons même de la glace !

 28-3-46: Dès 7 h 30, au port, au MM2. Le déchargement se déroule normalement. Difficultés cependant, avec les caisses CAIC. Au début de l'après-midi, arrivée du Paquebot ISMALI (Pavillon Britannique) qui doit, paraît-il, rapatrier les Hindous d'INDOCHINE. Le travail, qui doit se poursuivre de nuit, a été repris par DOREAU. Après lui avoir passé les consignes, à 20 h 30, je suis de retour à la villa.

 29-3-46: Au port à 7 h 30. Continuation du déchargement du BORYSLAW, pendant les heures habituelles. Le quai a été bien dégagé, grâce aux nombreux camions, mis à ma disposition. Ce soir, à 19 h, DOREAU m'a relevé, avec son équipe, pour le travail de nuit. Le FORT CHESTERFIELD et l' ISMALI sont partis, à midi. L'EMILE BERTIN est arrivé (Quai Militaire).

 30-3-46: Le déchargement continuant, j'étais au port à 7 h. Les articles militaires sont, presque tous, déchargés. A minuit, il n'en restera presque plus.

 Pas de chance, ces deux derniers jours. Hier, j'ai perdu mon insigne de la 2eme DB. Aujourd'hui ce fut le tour, de celui, de la France Libre. Et, ce soir, en allant prendre ma douche, j'ai failli me casser une jambe, en cassant réellement le baquet ! Les ennuis arrivent généralement, par trois. Ensuite cela va mieux ! Pas eu le temps de consulter l'horoscope ! (Auquel, je ne crois, d'ailleurs, pas du tout !)

 31-3-46: Hier, j'ai oublié de signaler, que le FANTASQUE et le TRIOMPHANT étaient arrivés, dans la soirée. Aujourd'hui, arrivée dans l'ordre, du JULES VERNE, de l' EMPIRE OF JAMAICA (Britannique) de l'ARTHUR A. PENN (USA), puis d'un LST français.

 Ce matin, au port à 7 h 30. On déblaye le quai. Pas de déchargement. A 16 h, fin du travail. GLOAGUEN est allé voir MARTY, à CHOLON.

 1-4-46: Ce matin, au réveil, en bon petit camarade, j'ai commencé par faire une petite farce, à DOREAU. (Poisson d'avril !). Puis, au port, de 7 h 15 à 11 h. Le BENREOCH (Britannique) est arrivé, vers midi. Le WELTEWREDEN est allé se placer, entre deux bouées. Le BORYSLAW a pris sa place, et l'ARTHUR A PENN, la place du     BORYSLAW. Un bateau de guerre: le GLOIRE? est arrivé ce soir. Le Commandant GRALL et le Capitaine MARTY, étaient invités à notre popote, ce soir.

 2-4-46: Au port, à 7 h 30. Cette matinée a été consacrée, presque exclusivement, au lent déchargement, de balles de sacs vides, pour les civils. Comme mouvement: Le CAMILLE PORCHE est parti, ce soir. GLOAGUEN part demain, comme instructeur de 40 Bofors, au 10eme RAC. Après avoir marché sur une pointe, j'ai légèrement mal au pied droit.

 3-4-46: A 7 h 30 au port. On descend toujours des balles de sacs vides. Collationnement en cours. Le CAP DES PALMES est parti. Le SAMDART (Britannique), et le BARFLEUR, sont arrivés. Suis resté au port, jusque 23 h. Où est la semaine de 40 heures?!

 4-4-46: Dans la matinée, peu de choses de déchargées. Rendement meilleur, dans l'après-midi. Le BENREOCH est parti, laissant sa place au SAMDEL, qui est arrivé, dans l'après-midi. Demain matin, j'aurai pratiquement terminé le BORYSLAW, mais je dois, dès 7 h, commencer le déchargement du SAMDEL. Le travail ne manque donc pas. Ma jambe gauche va déjà mieux, la droite est maintenant rétablie. Ce soir, à 22 h, j'irai chercher DOREAU, au port. Il décharge l' EMPIRE OF  JAMAICA.

 5-4-46: Au port, à 7 h. Le BORYSLAW est terminé. Toute la journée, je me suis occupé du SAMDEL. Le bateau est assez intéressant: véhicules et quelques tonnes de marchandises. Ce soir, on apprend que quatre hommes, ne sont pas rentrés du ravitaillement, dans le Sud.

 6-4-46: Continuation du déchargement du SAMDEL. La cale" l" était terminée hier soir, la" 5" le fut aujourd'hui, à midi. Surprise désagréable: remorques en caisses, ça ne roule pas ! L' ESPERANCE est arrivé, aujourd'hui, au matin. Deux hommes retrouvés, de l'histoire d'hier. Je travaille demain.

 7-4-46: N'ai terminé de décharger le SAMDEL, qu'à 18 h. Ouf ! Un de moins. Sont partis: le WELTEWREDEN, le PROMISE, le FORT LAJOIE et l' EMPIRE OF JAMAICA. Le BETELGEUSE et le PIERRE CORNIOU, sont arrivés. Demain, j'aurai encore à débarrasser le quai. Le BETELGEUSE, est un bateau, identique au CEPHEE. Ce sont deux céréaliers, qui faisaient la navette, entre MARSEILLE et le CANADA. Chargés à MARSEILLE, en moins de 10 heures, ils étaient déchargés au CANADA, plus vite encore, ce qui fait, que les escales étaient particulièrement courtes.

 8-4-46: Au port, à 7 h. Depuis 10 h, ce matin, LA PYROTECHNIE DE SAIGON EST EN TRAIN DE SAUTER (Une soixantaine de victimes).

Travail enfin terminé, à 16 h. Rien de particulier au port, si ce n'est que, le  SAMDEL  est parti, ce matin.

 9-4-46: Le KOTA INTEN (Hollandais) et le LEASIDE PARK (Britannique) sont arrivés. Suis de permanence, au transit, de 11 h à 14 h 30. Une partie de mon équipe, décharge le GLOIRE (aussitôt arrivé). A 18 h, j'apprends que l'équipe n 7,  la nôtre, travaille de nuit sur le KOTA INTEN. On n'entend plus d'explosions, dans la soirée.

 10-4-46: Ai travaillé, la nuit dernière, jusque 5 h, tout en étant de permanence, au transit. Permanence terminée, à 8 h. Suis revenu à la villa, où j'ai dormi, jusque midi. Après-midi au quartier. On fête les 25 ans de GLOAGUEN. Au port, dans la soirée, toujours sur le KOTA  INTEN. Le LEASIDE PARK et le SAMDART, sont partis.

 11-4-46: Le travail a duré jusqu'à 3 h, ce matin. Des caisses de pièces de monnaie, à garder sur le quai ! Ai dormi au camp, jusque 7 h. A 8 h, suis à la villa. Dormi jusque midi. Sieste à la villa, puis après-midi passée à bouquiner. Le WARIARDAR et le KASHIMA sont arrivés. DOREAU a terminé le KOTA INTEN. Demain, il continue à déblayer son quai. Ce soir, nous sommes tous les trois, à la villa. Il y a longtemps, que cela ne nous était pas arrivé.

 12-4-46: Au camp toute la journée. Lecture. Ne suis pas allé au port, pour la 1ere fois, depuis longtemps. Encore tous les trois à la villa, ce soir. La vie est belle.

 13-4-46: Encore au repos, aujourd'hui. L' HELIKON est arrivé, ainsi que le TOURVILLE. Le KOTA INTEN est parti. Préparation d'une manifestation indigène pour demain. Ce soir, il y a encore de la gaieté dans l'air !

 14-4-46: Quitté la villa à 11 h, ce matin (sauf GLOAGUEN). Pris l'apéritif en ville. Cette après-midi, suis allé chercher Claude VAN GHELE, au quartier VIRGILE. DOREAU travaille au port. Il attend le MATELOT BECUWE. En fin d'après-midi, suis allé en ville, avec le Lt CARADEC. Apéritif à la Pointe des Blagueurs. Le MATELOT BECUWE est arrivé, ainsi que le BEARN. Piqué contre la variole, le choléra et le typhus. Perçu une montre.

 15-4-46: Journée de repos, partagée entre la lecture et la mise à jour, des livrets matricules. A 19 h 30, je travaille au chargement du BETELGEUSE, qui doit se rendre à HAIPHONG. (Essence, vivres). C'est cet équipage, qui m'avait parlé, de leur travail de céréalier, entre MARSEILLE et le CANADA.

 16-4-46: Travaillé ce matin, jusque 3 h. Trois heures de sommeil, au camp (Avec MANOUSSARIDIS, qui travaillait sur le PIERRE CORNIOU). A 7 h 45, je suis à la villa. Après-midi au camp. A 19 h 30 au port. Continuation du chargement du  BETELGEUSE.

 17-4-46: Travaillé jusqu'à 3 h. A 8 h, suis à la villa, tout seul. Lecture pendant la sieste. Continuation du chargement du BETELGEUSE, à partir de 19 h 30. Sont arrivés: le MONCAY, le FORT KILMAR, l' ELORN, Le VAR et trois bateaux japonais.

18-4-46: Jusqu'à 11 h, même emploi du temps qu' hier. Déjeuner sur le PIERRE CORNIOU (Le Cdt, le Second, l'officier mécanicien, CARADEC, GLOAGUEN, MANOUSSARIDIS et moi). Après-midi à la villa, jusque 17 h. Travail de nuit habituel. L' ESPERANCE est parti.

 19-4-46: Rentré à la villa, à 7 h 30. Dormi jusque 11 h 30. En fin d'après-midi, suis allé à l'entraînement de basket. Puis au port, toujours sur le BETELGEUSE. Le CEPHEE est parti.

 20-4-46: Travail arrêté à 2 h. Plus rien sur le quai. A 7 h 30, suis à la villa, tandis que DOREAU travaille, de jour, sur le BROOKLEY MOOR, arrivé hier au port (Deux treuils sur une cale). Chargement de l'essence. Départ du BORYSLAW, du WARIALDAR, du LEASIDE PARK, de l' HELIKON et du BARFLEUR. Arrivée du ST LOUBERT BIE, et du CAP DES PALMES.

 21-4-46: Travail terminé, à 4 h du matin. A la villa, de 8 h à 12 h. Et à partir de 15 h 10. A 19 h 30, au port, pour ne pas changer.

 22-4-46: Terminé à 3 h 30, ce matin. Jusque 17 h, presque tout le temps à la villa. Lecture. Heureuse surprise: je ne travaille pas la nuit prochaine. Chic, je vais enfin, pouvoir dormir normalement. Le SUFFREN est parti, pour le TONKIN. Parti également: le JULES VERNE.

 23-4-46: Journée passée, bien tranquillement, au camp. Fête du Lt OULLIAC. Je ne travaille pas ce soir.

 24-4-46: Encore une journée au camp. Dans la soirée, suis allé faire un tour en ville, avec le Lt CARADEC. J'apprends, que je travaille demain, sur le MARIE JOSE ACOSTA. Le croiseur anglais EURYALUS, est arrivé. Le hollandais RENGAT et le BETELGEUSE sont partis (Ouf !).

 25-4-46: Au port à 8 h 30. Le MARIE JOSE ACOSTA n'est pas venu. A sa place est accosté le JOHAN DE WITTE, (Hollandais), amenant MOINAUX et l'Aspirant PECASTAING. N'ai pas travaillé au port. Arrivée aujourd'hui, du GLORIA (Panama), du PIGNEAU DE BEHAINE, et d'un LST. Le WAKATAKA (Japonais) est parti. Travaillerai-je demain ?

 26-4-46: Au camp ce matin. A 15 h 30, appelé au port. Prendre les renseignements sur le DOCTEUR ROUX, qui est arrivé aujourd'hui, et que je dois commencer à décharger, demain. En fin d'après-midi, match de basket à la Citadelle. Ce soir, vie normale à la villa: farces, essais de mots d'esprit, et chants. Souvent on chante faux, mais au moins on chante !

 27-4-46: Commencé le déchargement du DOCTEUR ROUX, dès 7 h 30. Aujourd'hui sont partis: le VAR, le LST 347, le FORT KILMAR, le JOHAN DE WITTE, le BEARN. Arrivée du LST 359, du torpilleur d'escorte américain 643, du MARIE JOSE ACOSTA. Un mixte japonais, a chargé des prisonniers, puis est allé se placer, au K l5. Demain, les équipes sont au repos. Depuis hier, PECASTAING est dans notre villa (Rez-de-chaussée).

 28-4-46: Grasse matinée. (Une fois de temps en temps, cela ne fait pas de mal, et nous savons l'apprécier). A 10 h, nous étions devant la Cathédrale archi comble. Pris l'apéritif, rue Catinat (La canebière d'ici !).

Des aveugles musiciens.

A notre arrivée à SAIGON, des anciens, nous voyant, sincèrement apitoyés, par le spectacle affligeant, de quelques LOQUES HUMAINES EUROPEENNES, sur des bords de trottoirs, nous ont dit:" VOYEZ LE RESULTAT DE LA DROGUE, ici l'opium n'est pas cher, goûtez y, et voilà ce que vous risquez". La leçon a porté, et je ne connais AUCUN DE MES CAMARADES, qui y ait goûté, pour voir ! Avec les cigarettes et l'alcool, nous avons déjà suffisamment de poisons, pour nous détruire, légalement !

Nous nous déplaçons beaucoup, en pousse-pousse (Gagne-pain de beaucoup d'Annamites). Généralement cinq piastres la course (nam dong, en langue locale) reçues avec remerciements, et toujours avec le sourire. Nous nous entendons très bien, avec les gens du pays. Nous avons des différences, mais nous nous adaptons très bien, à nos qualités et aussi, à nos défauts réciproques !

 La température à SAIGON, n'est pas catastrophique, mais suffisante, pour nous faire transpirer en permanence, ce qui irrite la peau, et provoque la bourbouille, que nous combattons, grâce à la Lotion DE FOUCAULT.

 Dans l'après-midi, à la villa, jusque 16 h, puis nous sommes allés, au JARDIN BOTANIQUE (Des éclats, provenant des explosions de la Pyrotechnie). Pris des photos, puis l'apéritif, à la POINTE DES BLAGUEURS. Le MARECHAL JOFFRE est arrivé, avec des renforts masculins et féminins. Au lit, de bonne heure.

 29-4-46: Au port ce matin, à 7 h 15. Continuation du déchargement. Un pétrolier japonais est arrivé.

 30-4-46: Le temps passe vite, lorsque l'on a du travail. Journée au port, sur le DOCTEUR ROUX. Demain, le Général JUIN, accompagné du Général LECLERC, (Mon patron, depuis l941), doit venir nous inspecter, aux bateaux.

 1-5-46: Toute la journée au port, ainsi que, de 19 h à 23 h. (Remplacé par PECASTAING, affecté à notre équipe). Le Général JUIN n'est pas venu. Le bateau japonais, arrivé hier soir, est reparti à 15 h. Un autre est venu le remplacer, ce soir. Le MALIKA est remplacé, par le FORT CHESTERFIELD. DOREAU a terminé le déchargement du BROOKLEY MOOR, qui doit partir demain. Le PIERRE CORNIOU est parti hier.  Remplacé  par  le GLORIA. 23 h 30: au lit!

 2-5-46: Toujours au déchargement du DOCTEUR ROUX. 1ere cale terminée, à 11   h. La 2 et la 3 sont bien avancées. Mais ce n'est pas tout, de décharger, il faut maintenant, recharger ce bateau, pour le TONKIN. Travail, qui doit commencer demain. Le MARIE JOSE ACOSTA est parti, ce matin. Le bateau japonais EITOKUMARU est parti, dans l'après-midi. Remplacé par un autre Japonais. Dans la soirée, le Lt GARNIER, est arrivé au groupe, en remplacement du Lt  OULLIAC. Pas de travail de nuit. Le BROOKLEY MOOR est parti.

 3-5-46: Au port, et de permanence, par dessus le marché. Le CAMILLE PORCHE est arrivé, ainsi que le HUYN KHUONG AN (Français d'Indochine) et le PROMISE. Sont partis: le FORT CHESTERFIELD, et l' ESAU MARU japonais. Nuit passée au transit.

 4-5-46: Fin du déchargement du DOCTEUR ROUX, et début du rechargement. Déménagement: On change de villa. Plus près de la gare. GLOAGUEN n'est plus avec nous, ici. Je travaille demain. Le MONCAY et l'EMILE BERTIN sont partis. Le CHESHIRE et le TOURVILLE sont arrivés.

 5-5-46: Au port, chargement en bonne voie. Le PROMISE est parti. Le CAMILLE PORCHE s'est déplacé. Un croiseur japonais est arrivé. Ce soir, bagarre contre trois moustiques, qui ont eu le culot, de venir se fourrer sous ma moustiquaire !

 6-5-46: Le chargement continue, à une cadence accélérée, mais sans incidents. Aujourd'hui, des criminels de guerre japonais, ont été amenés au CHESHIRE, sous bonne escorte, pour être déposés aux îles POULO CONDOR (Le bagne d'ici). Arrivée du FORT TRUTH, hier soir et, aujourd'hui, au soir, le JOSE MORELOS. Partis: le ST LOUBERT BIE, remplacé par le CAMILLE PORCHE, et le torpilleur japonais HARUZIKI. PECASTAING est de nuit, sur le DOCTEUR ROUX.

 7-5-46: Au réveil, ce matin, pluie torrentielle, qui a duré jusque dans l'après-midi. Travail au port, impossible. Me suis occupé du compte rendu de déchargement. DOREAU, ce soir, sur le TOURVILLE. Au mess, ST PAUL nous a passé quelques films, dont un Charlot et un Mickey. A la villa, ce soir, invasion de fourmis ailées.

 8-5-46: Au port, le travail a encore été coupé, par plusieurs pluies. Le CHESHIRE est parti, ce matin, ainsi que l' HOSUMARU. Le NAMIKAZE est arrivé. C'est aujourd'hui, l'anniversaire de la victoire 45. Le Lt CARADEC est allé à MY THO; revenu ce soir. Dans notre villa, tout est calme.

 9-5-46: Réveil tardif, ce matin. Il fait nettement moins chaud, depuis que les pluies ont fait leur apparition. Au port, toute la journée. Difficultés sur le bateau (Farines mouillées). Le WAKATAKA est arrivé, ainsi que le GEO A. CUSTER: rapatriement des Japonais.

 10-5-46: Au port, dérangés par la pluie. Le GEO A. CUSTER est parti, ainsi que le TOURVILLE, et le WAKATAKA. Sont arrivés: le TENCER (Britannique), et le SOYA (Japonais). Ce soir, au mess: cinéma: Félix le chat, un documentaire et" Vous n'avez rien à déclarer ?". Travail de nuit, par PECASTAING.

 11-5-46: Réveil aussi difficile qu'hier, en raison de la fraîcheur matinale. Au port, le déchargement se fait, au ralenti. Sont partis l'ARTHUR A. PENN, et le SOYA. Travail de nuit, par PECASTAING.

 12-5-46: Dimanche. Et voici une journée, aussi inefficace, que la veille, en raison de la pluie. On attend le beau temps. Hélas, les éclaircies sont de courte durée, et le DOCTEUR ROUX ne se charge pas. Ce soir, il pleut et nous sommes tous à la villa. Plus il y a de fous, et plus on s'amuse !

 13-5-46: Enfin, le travail a pu recommencer, le temps étant, parfois, moins pluvieux. Arrivée du BEARN, de l'OCEAN VESTAL, du SAMMITTE et de l'EIROKU MARU. Le LST Q 047 est parti.

 14-5-46: Le travail continue. Les camions rentrent, à bord, ce soir. Il n'en reste plus que deux, à mettre en cale. L'EIROKU MARU est parti. Le JOSE ACOSTA est revenu.

15-5-46: Enfin, le DOCTEUR ROUX sera bientôt terminé, en dépit de la pluie. Quel soulagement, quand je le verrai partir ! Aujourd'hui, on a pu travailler, sur quatre cales. (Rations Pacific). Un orage d'une assez grande violence, à midi. 10 cm d'eau, dans la cour du quartier. Au début de l'après-midi, match de ping-pong, contre ST PAUL, match arrêté en raison de la fragilité, et surtout, de la pénurie de balles. Joué aussi, contre le Capitaine OSTY, et le Capitaine DENINGER. Au port, le RICHARD MOORE et le VAR sont arrivés. Cette nuit, PECASTAING continue la cale" 1", du DOCTEUR ROUX.

 16-5-46: Travail intensif, toute la journée, malgré une pluie fine, dans l'après-midi. A 10  h, ai fourni le compte rendu de chargement, du DOCTEUR ROUX, qui est enfin pratiquement terminé, ce soir. A 17 h, le MARECHAL JOFFRE est parti, pour la FRANCE, avec un nombre respectable de passagers. Le MORELOS est également parti, dans la journée. Ce soir, à la villa, nous étions au complet. Nous nous sommes amusés, comme des petits fous. (GETTO et ST PAUL, étant venus nous rejoindre).

 17-5-46: Un petit tour au port, ce matin. Maintenant, le DOCTEUR ROUX est fini et bien fini ! Le GENERAL L E C L E R C, est passé sur les quais, peu avant 11 h. Le Colonel CHANSON, est venu déjeuner, à la popote. Dans l'après-midi, ping-pong, contre GETTO. Dans l'après-midi, encore, au football, l'équipe du groupe, inflige un (6-O), sans appel, à l'équipe du Q. G. 15. A la villa, sommes au complet, ce soir.

 18-5-46: Matinée tranquille. Repos. Dans l'après-midi, j'attends le BETELGEUSE, que je suis chargé de décharger. Il arrive à 17 h 30, avec un nombre respectable de passagers, dont un mort. (Pavillon en berne). Comme arrivées: le TOURVILLE, le SUFFREN, la GRACIEUSE, OCEAN VERITY. Le DOCTEUR ROUX est enfin parti !

 19-5-46: C'est ma fête. Cela ne m'empêche pas, de décharger les bagages, les munitions et le courrier du BETELGEUSE. Le mort a été débarqué également, dans la matinée. MOINAUX devient chef d'équipe au port. Ce soir, sommes encore au complet, à la villa. Le SAM FAITHFUL est reparti.

 2O-5-46: Dans la journée, ai terminé le déchargement du BETELGEUSE. A sa place, doit venir le HUYN KHUONG AN, que notre équipe, doit maintenant charger, (Tous deux pour le TONKIN). L' HELIKON est arrivé. Ce soir: au camp: cirque ambulant: des numéros excellents.

 21-5-46: Matinée et après-midi, sur le HUYN KHUONG AN (H. K. A.), PECASTAING sur le BEARN, qu'il a terminé, ce soir. Le TOURVILLE et le SUFFREN sont partis. L' OCEAN VESTAL est accosté, au K 6. Le CAMILLE PORCHE est parti. Ping-pong, contre GLOAGUEN et MANOUSSARIDIS (Le Grec: on s'en serait douté !).

 22-5-46: Le BEARN et le TENCER, sont partis. L'AGNES est arrivé.

 23-5-46: Journée passée sur le (H. K. A.) qui charge de la farine (Toujours menace de la pluie !). Sont partis: le DAVID B. MOORE, le PIGNEAU DE BEHAINE, le MATELOT BECUWE (Qui part pour la FRANCE). Ping-pong, contre DOREAU.

 24-5-46: Le chargement continue, dans la matinée. Après-midi handicapée par la pluie. Déménagement; un de plus. Sommes maintenant, dans un Hôtel chinois. Un par chambre, pour le moment. La nuit dernière, a été excessivement orageuse. Espérons, que celle ci, sera plus calme.

 25-5-46: Au port, toute la journée. Du changement, pour mon bateau. Il va maintenant falloir, que j'en décharge une partie. Parution de l'Albatros et, ce soir, création de" La sirène". Proclamation de la République de COCHINCHINE, différée.

 26-5-46: Une partie de la matinée, et toute l'après-midi, au port. Dans la soirée, sommes allés, GALLOIS, DOREAU, et moi, sur le J. J. ACOSTA.

 27-5-46: Au port, toute la journée. Déchargement et chargement. De plus, c'est mon 25eme anniversaire, je deviens éligible ! Une belle jambe !

 28-5-46: Le chargement du H. K. A., continue. L'OCEAN VESTAL est parti. Le DREXEL VICTORY, et le SAMSKERN, sont arrivés. Ping-pong, avec le Capitaine OSTY. Les Anglais, qui habitaient notre Hôtel, sont partis. (Quelques récupérations).

 29-5-46: Toujours sur le H. K. A. Travail freiné, par les indécisions supérieures. Le WILLIAM GRAY, et le JULES VERNE, sont arrivés. PECASTAING travaille, sur le DREXEL VICTORY, et DOREAU, sur le SAMSKERN. Décidément, il y a de l'occupation, en ce moment. Ce soir, ping-pong, contre MANOUSSARIDIS. Envoyé un colis, à la TAVERNE ALSACIENNE, de SCEAUX.

 3O-5-46: Toute la journée, au port. Ping-pong contre DENINGER, puis   PECASTAING. Ce soir,   à l'Hôtel, nous avons installé un ping-pong. Ainsi, il y aura de l'occupation tous les soirs. Le GLORIA est parti, et la GRACIEUSE est arrivée.

 31-5-46: Au port, toute la journée, au chargement du H. K. A. De permanence de 11 h 30 à 14 h. Arrivée de l" ALEXANDRE DE RHODES", et de l' HENRY MOUHOT (Ce qui porte à cinq, le nombre de bateaux destinés à l'INDOCHINE, actuellement en service ici). De permanence, au transit, toute la nuit. Repêché un cadavre, dans l'après-midi !

 1-6-46: Le chargement du H. K. A. se poursuit, à un rythme accéléré. Le DUQUESNE est parti. Le LOUIS SLOSS (USA) est arrivé. Ping-pong, contre DOREAU.

 2-6-46: Encore un dimanche, passé au port. En fin de soirée, sommes allés en bande, au MAJESTIC, où l'on présentait le film" La Grande Epreuve". Au port, le YERSIN est arrivé, (6eme bateau de la série indochinoise).

 3-6-46: Au port, toute la journée. Le chargement se poursuit, à toute vitesse. Le WILLIAM GRAY s'est déplacé, à B 13. Le MONGOLIA, arrivé à 18 h, a pris sa place, à K 2. Reçu une lettre de JOJO DEROBERT, qui est revenu de DAKAR. Il est engagé, dans la TRANSAT.

 4-6-46. Sur le H. K. A., pour ne pas changer. Enfin, il se termine, probablement, après-demain. Ce soir, me suis fait soigner pour quelques plaies infectées aux jambes.

 5-6-46: Chargement bientôt terminé. Espère pouvoir être enfin libre, demain soir. A quand le prochain bateau ? Deux ou trois jours de calme, ne seraient pas de refus. Aux élections du 2 Juin, en FRANCE, le MRP sort grand vainqueur. Ici, ping-pong, avec DOREAU. Les autres camarades sont au cinéma.

 6-6-46: Toujours sur le H. K. A., mais, demain, il s'en va. Bon voyage. Ce soir, je travaille au compte rendu de chargement. BETELGEUSE est parti, pour LA REUNION.

 7-6-46: C'est avec la plus grande satisfaction, que j'ai vu partir, au début de l'après-midi, le HUYN KHUONG AN ! dont le chargement s'est terminé, à 11 h. Le PIERRE CORNIOU est également parti, pour HAI PHONG. Vu ASBACHER. Cet après-midi, je goûte, enfin, aux joies du repos. Pour combien de temps ?

 8-6-46: Repos, sur toute la ligne, à commencer par une bonne grasse matinée réparatrice. Lecture des journaux locaux: Le Journal de SAIGON, L'  Avenir, Le Populaire, Indo -soir, le Paysan de Cochinchine. Au début de l'après-midi, de la terrasse de notre Hôtel, un rapide coup d'oeil, sur les bateaux du port. Le MONGOLIA est parti, ce matin.

 9-6-46: Dimanche. Bonne grasse matinée. Puis, DOREAU et moi, sommes allés à la messe, à la Cathédrale. Pris l'apéritif en ville. L'après-midi, je suis de permanence, au quartier. Je m'occupe comme je peux, jusqu'à 17 h. Puis, rédaction de" La sirène". Dans la soirée, ping-pong, à l'Hôtel, et réunion chez MORIN. Depuis aujourd'hui, je suis passé dans la chambre de DOREAU, car le PASTEUR est arrivé au CAP ST JACQUES. Deux Officiers sont annoncés. En ville, on commence à voir les drapeaux cochinchinois.

 10-6-46: Debout de bonne heure, pour le cas, où le ST LOUBERT BIE serait arrivé. Je dois, en effet, le décharger. Comme il n'était pas là, je me suis occupé au quartier, et à l'Hôtel. A 11 h 30, apéritif CHEZ JEAN. On fête les 22 ans de  PECASTAING. Le LST 326 a amené ce matin, les premiers passagers du PASTEUR. Après-midi à l'Hôtel. Dans la soirée, ping-pong, contre ST PAUL.

 11-6-46: Levé à 8 h. Un tour au quartier, puis sur les quais. On attendait la Batterie" C", qui est arrivée à 11 h 30. Le ST LOUBERT BIE en vue à 11 h 45.

 Après-midi, au port. Le déchargement commencera,  demain -matin. En fin d'après-midi, entraînement au football. Ah mais ! On est sportif, ou on ne l'est pas. Ainsi donc, ce soir, à l'Hôtel, il y a deux nouveaux pensionnaires: Le Lieutenant HENRIOT, et le Sous-lieutenant LAPEZE, mais pas pour longtemps, à ce qu'il paraît. Des bruits se confirment, comme quoi, ils partiraient bientôt en opération. Les derniers seront les premiers. On a déjà entendu cela, quelque part !

 12-6-46: Déchargement du ST LOUBERT BIE, toute la journée.

 13-6-46: Sur le ST LOUBERT BIE. Le déchargement militaire est terminé, mais, à partir de demain, on recommence à charger. En fin d'après-midi, entraînement au football. Dans la soirée, cirque au quartier.

 14-6-46: Le chargement du St LOUBERT BIE, a commencé, ce matin. Il avance à toute allure. La cale" 1" est déjà presque terminée. Il paraît, qu'il faut le charger, en un temps record. On va essayer. Ce soir, réunion chez les Aspirants: chants, histoires, etc.

 15-6-46: Dès 7 h, au port. Avons parfois été gênés par la pluie. Ayant travaillé jusqu'à 18 h, je n'ai pas pu assister, à un apéritif, offert par le Général MAMIERS, qui arrose ses étoiles. Ce matin, un LST est parti pour le CAP ST JACQUES, avec des passagers, destinés au PASTEUR, qui repart pour la FRANCE.

 16-6-46: Au port dès 7 h. Travail jusque midi. Reprise, à 13 h. A 15 h, gênés par la pluie. La vitesse de chargement reste, malgré tout, excellente.

 17-6-46: Le réveil a été assez pénible, car j'avais travaillé tard, hier soir. Et DOREAU, qui était de permanence au Transit, n'était donc pas là, pour me réveiller. Le chargement a bien marché, jusque 14 h 45. Puis la pluie est venue tout arrêter. Espérons que, demain, le temps sera plus favorable.

 18-6-46: Anniversaire de l'appel historique, du Général DE GAULLE, en 1940. C'est jour férié. Pas pour moi. Le chargement du ST LOUBERT BIE, s'est poursuivi, d'autant plus rapidement, que les averses, ont été de courte durée. J'ai bon espoir, maintenant de le voir terminé, demain soir.

 19-6-46: Il y a six ans, je commençais la série de tentatives d'évasion. Comme le temps passe vite ! Au port, toute la journée. Demain il restera encore quelques véhicules à embarquer. Il faudra aller vite, car le bateau part, à 9 h.

 20-6-46: Dès 7 h, au port. Chargement des derniers véhicules, des passagers, établissement des connaissements. Enfin, à 10 h, le départ. Ouf ! Un de plus de fait. Dans l'après-midi, une bonne sieste réparatrice, dans une autre chambre de l'Hôtel, car, il a encore fallu déménager. Ce soir, je revois un aide-mémoire de géométrie (Maths- Elem). (Cela faisait six ans, même davantage, que je n'y avais pas touché.

 21-6-46: Journée de repos complet. (Apprécié après les dernières semaines, qui ont été assez harassantes). Pour m'occuper, je revois de la géométrie. L'aide-mémoire, que DOREAU a reçu avant-hier, est bien utile. Ce soir, à dîner, nous avons eu le plaisir de recevoir, comme invités, le Colonel DE GUILLEBON et un Commandant. DOREAU est de permanence au transit.

 22-6-46: Et voici une journée de plus, de repos complet. Demain, une partie de mon équipe, débarque les colis postaux, arrivés sur l'IDA BAKHE, venant de MARSEILLE.

 23-6-46: Une journée de plus de repos, mais la dernière pour quelques jours, car, demain après-midi, notre équipe décharge l'IDA BAKHE. Suis donc resté, pratiquement toute la journée, à l'Hôtel. Un petit tour cependant, au VILLE DE STRASBOURG, sur lequel DOREAU travaille.

 24-6-46: Repos dans la matinée. Dès 11 h 30, de permanence au transit. Dans l'après-midi, déchargement de l'IDA BAKHE, puis reprise de la permanence au transit, jusqu'au lendemain matin. Lecture de MEIN KAMPF de HITLER.

 25-6-46: Le déchargement continue, toute la journée. On commence à s'occuper sérieusement, des pelotons d'alerte. En fin d'après-midi, entraînement au football, près du Foyer du Soldat. Je commence à me spécialiser, comme arrière -gauche.

 26-6-46: Déchargement, toute la journée.

 27-6-46: Il y a six ans, j'arrivais cette après-midi, à LONDRES, sans avoir jamais entendu, l'appel historique du Général DE GAULLE, dont je n'avais jamais entendu parler. Parti en ANGLETERRE, pour contribuer à aider les Anglais, dans leur lutte contre les Allemands, j'ai évidemment été ravi, de voir qu'un Général français, DE GAULLE, prenait la tête d'unités françaises, pour reprendre le combat. Après l'avoir vu et entendu, dans notre camp de réfugiés, je l'ai suivi d'instinct, aveuglément, et ne le regrette pas.

 Ici, le déchargement de l'IDA BAKHE, se poursuit. Ce soir, match de football: les Officiers, contre les Sous-officiers et hommes (O -O). Ah mais ! Franchement, il n'y a pas lieu d'être mécontents.

 28-6-46: Journée de travail normal au port. Le déchargement prend bonne tournure. Hier, on a appris la formation du nouveau gouvernement, en FRANCE. Espérons, que Mr BIDAULT nous préconisera, une politique plus énergique, surtout en ce qui concerne l'INDOCHINE. On se prépare à de nouveaux troubles. On peut même dire, que nous sommes prêts.

 29-6-46: Déchargement toute la journée. Ce soir, n'ai pas pu aller à l'entraînement, car j'ai mal à un genou. Ce soir, on est prêt pour l'éventuelle attaque, prévue pour cette nuit !

 3O-6-46: Dimanche. Non seulement je travaille au bateau, mais de plus, je suis de permanence au transit. Comme occupation, ai lu la moitié d'un livre de André TARDIEU:" Avec FOCH.

 1-7-46: Nuit assez agitée. Des coups de fusil, un peu partout, mais rien de grave. Six ans de service aujourd'hui, et pratiquement tout, en campagne double ! Déchargement de         l' IDA BAKHE. Les navires actuellement au port sont: le VILLE DE STRASBOURG, l' AMARAPOORA (Hôpital anglais), le TOURVILLE, l'IDA BAKHE (Norvégien), le GLORIA (Panama), le HUYN KHUONG AN, le YERSIN, l' HENRI MOUHOT, le GEORGIAN (USA), le DOCTEUR ROUX, le SUFFREN, le JULES VERNE, le LST 35O5 (Britannique). En somme il y a du travail pour tout le monde. Pas d'entraînement au football, à cause de mon genou.

 2-7-46: Un peu fatigué hier soir (Maux d'estomac). J'ai passé une bonne nuit, en dépit des coups de mortier, que certains ont entendus. Toujours sur l'IDA BAKHE. Sont partis: le TOURVILLE, un pétrolier, le HUYN KHUONG AN, l'HENRI MOUHOT, et l'EMILE BERTIN. Le RICHARD B. MOORE est arrivé. Demain, travail de 7 h à 19 h. Il faut accélérer.

 3-7-46: Travail au port de 7 h à 12 h et de 13 h à 19 h. Ah mais ! Demain, je termine l'avant-dernière cale, mais il reste la troisième. L' AMARAPOORA est parti ce matin. L' AUGUSTE PAVIE est venu au MM3. Un cargo norvégien (HERMELIN), et un porte-avions japonais, sont arrivés, dans l'après-midi. Ce soir, à l'Hôtel, je me suis occupé des notes trimestrielles des Sous-officiers et hommes de mon équipe.

 4-7-46: Independence day. Journée passée au port. Le VILLE DE STRASBOURG, le FANTASQUE et le PACIFIC sont partis. Ce soir, à l'Hôtel, préparation du compte rendu de déchargement, de l'IDA BAKHE, qui sera probablement fini demain.

 5-7-46: Toujours sur l'IDA BAKHE, et ce qu'il y a de pire, c'est que je ne suis pas arrivé, à le terminer ce soir. Peut être demain matin. Le PIGNEAU DE BEHAINE est venu se placer au MM4. L'HELIKON, arrivé hier soir, est sur bouées. Ce soir un SAM est encore arrivé.

 6-7-46: A 10 h 30, le déchargement, qui s'était poursuivi à toute vitesse, a enfin été terminé. L'IDA BAKHE est parti à midi. Le MALACCA est parti également. Le DOCTEUR ROUX est à quai. Dans l'après-midi, on déblaye le quai. Ce soir, à l'Hôtel, on fait les fous, à quatre, PECASTAING et LARD étant venus nous retrouver.

 7-7-46: Un petit tour au port, en fin de matinée. Le RICHARD B. MOORE est parti, ainsi que le HERMELIN. Dans la soirée, le COLOMBIE est arrivé. Dans l'après-midi, je suis resté au quartier, étant de permanence. Ai lu Monsieur, Madame et bébé. Nuit calme au quartier.

 8-7-46: Dans la matinée, ai préparé le compte rendu de fin de déchargement de l'IDA BAKHE. Dans l'après-midi, un petit tour au port. Le quai se déblaye.

 9-7-46: Un tour au port, dans la matinée. Puis, je suis revenu à l'Hôtel. Dans l'après-midi, mon bateau, le WILLIAM ELIARY n'étant pas encore arrivé, je suis revenu à l'Hôtel, finir un travail. Un autre tour sur les quais, puis soirée calme à l'Hôtel.

 1O-7-46: Un tour au port, dans la matinée, puis continuation du compte rendu de déchargement de l'IDA BAKHE (Un vrai cauchemar). Enfin, à 15 h 3O, il est terminé. Contre-ordre: je ne déchargerai pas le WILLIAM ELIERY, mais chargerai le PIGNEAU DE BEHAINE, pour HAI PHONG, probablement. Tant mieux, j'aime autant cela. Au football, contre les Sous-officiers, gagnons par 3-2.

 11-7-46: Dans la matinée, approvisionnement du quai, en rations Pacific. Dans l'après-midi, le chargement du PIGNEAU DE BEHAINE a commencé. En fin d'après-midi, match de basket-ball (FTA -CRD). Ai joué 10 minutes environ (Battus (32-26). Etant de permanence, je dors ce soir, au quartier.

 12-7-46: Nuit calme. Journée passée au port. Le chargement, continue, mais pas assez vite à mon gré. L'approvisionnement est trop lent. Avons touché 50 cigarettes Domino. (Ce sont, peut être, celles débarquées de l'IDA BAKHE) (A l'occasion du 14 Juillet) (Après-demain).

 13-7-46: Toujours au travail, et, de plus, de permanence. Le COLOMBIE est parti à 13 h. Le BIR HACKEIM est arrivé, dans la soirée. Ce soir, une bouteille de champagne (MUMM CORDON ROUGE) nous a été offerte par les Transitaires civils. Une par chef d'équipe. Soirée agitée, à la permanence (force coups de téléphone).

 14-7-46: Dimanche. Chic !  Repos aujourd'hui, et demain. Comme de juste, on s'en donne à coeur joie. Et, à 11 h 30, nous sommes déjà bien gais. Dans l'après-midi, il y a des abandons. PECASTAING, LARD et moi, sommes allés voir l'arrivée du" CAP ST JACQUES", dans l'espoir de boire un verre. A 16 h, on se réunit, au complet, devant les bouteilles de champagne, qui sont éclusées en un instant. Cette fois-ci, de nouveaux abandons et, LARD et moi, repartons au dancing. Soirée calme !

 15-7-46: Réveil tardif, ce matin, après une nuit assez agitée, probablement la réaction de l'alcool. Un tour en ville, dans l'après-midi, avec DOREAU et LARD. On profite du repos, comme on peut. Demain, en effet, le travail recommence. Ce soir, avions deux invités: deux Norvégiens. Ils commandent le FOOMING (Pavillon anglais et équipage chinois).

 16-7-46: La nuit dernière, nous a permis, de nous remettre, complètement, d'aplomb. Au travail à 7 h 30. Le chargement du PIGNEAU DE BEHAINE continue, mais pas bien vite. L'approvisionnement est toujours trop lent, à mon gré. A l'heure de l'apéritif, ping-pong, avec GLOAGUEN. Après-midi au port. A 17 h 30, à l'Hôtel, qu'il fait bon se trouver dans sa chambre, une fois le travail terminé. Un sirop de menthe, une cigarette Domino (perçue aujourd'hui) une bonne douche, et puis, on est en forme, pour le dîner.

 17-7-46: Travail habituel au port, tantôt au ralenti, tantôt à toute vitesse selon les arrivages. En fin d'après-midi, match de football, contre les Sous-Officiers. Avons gagné (2-1), après une partie relativement farouche, bien disputée. Ce soir, le Capitaine Payeur était invité à notre popote.

 18-7-46: Le chargement du PIGNEAU DE BEHAINE continue. La partie la plus intéressante est commencée: (Véhicules: petits dans les grands). A 10 h 30, n'ai pas pu, faute de temps, assister au DISCOURS d'adieu, DU GENERAL LECLERC, qui est muté en Afrique du Nord. Dans la soirée, entraînement au basket, avec les Sous-officiers. Décidément, le sport est roi dans notre groupe.

 19-7-46: Le chargement a été fortement gêné, au courant de l'après-midi, par de fréquentes et violentes averses. Depuis hier, au bar de la popote, nous pouvons déguster du VERMOUTH (Cassis) et des liqueurs françaises. Voilà un bon signe ! Dans la soirée, préparation du compte rendu de chargement du PIGNEAU DE  BEHAINE.

 2O-7-46: Ai travaillé au chargement de véhicules, toute la journée. (Cela m'en fait 40, de chargés, et il y a encore de la place !). En fin d'après-midi, match de football. Officiers contre les hommes. Nous sommes battus (O-3). On fera mieux la prochaine fois ! Consolation: c'est l'une des meilleures équipes de SAIGON. Suis seul à l'Hôtel, ce soir, DOREAU étant de permanence au quartier.

 21-7-46: Et voici un dimanche de plus au travail. Le chargement approche de la fin. Que d'éclopés: DOREAU, PECASTAING, ST PAUL (A demi assassiné !). L'équipe (de foot !) est en mauvaise posture. Une lettre de Robert LE JEUNE (Le fils de mon forgeron d' HENVIC), qui est à BARIA. En fin d'après-midi, match de basket, entre les Sous-officiers et les hommes. Les premiers ont gagné (11-8). Beau match en terrain détrempé.

 22-7-46: Le réveil est assez pénible, ces jours-ci. Le chargement continue tout doucement.

 23-7-46: Au bateau, le plus tôt possible. En fin d'après-midi, match de football, entre les Sous-officiers et les Hommes. Les hommes ont encore gagné (1-2). Ce soir, nous sommes réunis, en bande, devant le poste de radio de GETTO, et une bouteille de BENEDICTINE. Un cigare là-dessus !

 24-7-46: Le travail continue, au port. La vitesse a été sérieusement augmentée. Le DOCTEUR ROUX est parti, ce matin.

 25-7-46: Travail intense. Il faut que le chargement soit terminé, pour demain midi. On travaillera donc, la nuit prochaine. En fin d'après-midi, match de basket, entre les Sous-officiers et les Officiers. Y jouais à l'aile gauche. Avons, tout de même, perdu (2O-4). Le" CAP ST JACQUES" parti, pour FRANCE. (Expression d'ici).

 26-7-46: Le chargement est terminé, les comptes rendus sont fournis. Tandis que le PIGNEAU DE BEHAINE s'en va (à 14 h), je suis de nouveau au repos. Voilà qui va me faire le plus grand bien. Dommage, que DOREAU soit, ce soir, de permanence au quartier. En fin d'après-midi, match de Volley-ball. Officiers contre Sous-officiers et Hommes.

 27-7-46: Joies du repos aujourd'hui. Réveillé à 6 h 15, par habitude. Plaisir de se dire: mais je ne travaille pas aujourd'hui ! Le temps de se retourner, puis j'ai somnolé, jusqu'à l'arrivée de DOREAU, à 9 h 30. Lui aussi est de repos. Des bruits courent, comme quoi, le travail au transit, est à peu près terminé.

 Si seulement c'était vrai, et que notre groupe puisse se reconstituer, et prendre part, à la vie de poste. Voilà, ce dont je rêve, depuis longtemps. Le temps passé au transit, à décharger et à charger des bateaux de tous genres, et de toutes les nationalités, m'aura tout de même été très utile. Une expérience de plus. Il faut savoir tout faire, dans la Coloniale !

 En fin d'après-midi, avons eu un match de football, contre les Sous-Officiers. Perdu (1-2) (Score non mérité, d'après l'opinion générale). Depuis cet après-midi, le bar de l'Hôtel MIRADOR, où nous sommes, est ouvert au public. Plus tard, il y aura musique et danse.

28-7-46: Et voici encore une journée de tout repos. Levé fort tard. A 13 h, nous avons dégusté le MARTELL, offert par le Transit, à chacune des équipes de chargement et de déchargement. Me suis encore entraîné au basket, au camp, jusqu'au moment, où la pluie est venue nous déranger. Je ne suis pas du tout sorti en ville, aujourd'hui.

 29-7-46: Réveil très tardif, ce matin. DOREAU est de permanence au Transit, à midi, et la nuit prochaine. En fin d'après-midi, match de basket entre les Officiers et les hommes. (10-10). J'ai réussi à marquer les 10 points de notre équipe.

 30-7-46: Le repos continue. Pas avant 11 h, au quartier. Dans l'après-midi, lecture. A partir de 17 h, me suis entraîné au basket. Un match de volley-ball a eu lieu, à 17 h 30, entre les Sous-officiers et les Hommes. Le MARECHAL JOFFRE est arrivé de FRANCE, cet après-midi. Ce soir, avec DOREAU, sommes allés faire un tour, sur le quai du Port de guerre, avons remonté la rue CATINAT, puis, au retour, avons pris le digestif, à la POINTE DES BLAGUEURS. Mon équipe au transit, est enfin dissoute, ce qui va me permettre, de revenir, très bientôt, au travail du groupe. Ceci ne m'empêche pas, d'être de permanence au transit, demain et la nuit suivante. ENFIN MES DESIRS COMMENCENT  A  SE REALISER !

 31-7-46: DOREAU, travaillant dans la matinée, sur un LST, s'est levé de bonne heure. Moi, par contre, j'ai fait le lézard, jusqu'à 8 h 30. Il y a un an, à CHAMPLAN, je me déplaçais en Opel ! (Kapitän). Et, ici, je me déplace, surtout à pied ! C'est peut être hygiénique, mais parfois, c'est préjudiciable au travail. Touché la solde. Sérieusement augmenté, en raison de mon passage au 3eme échelon. En fin d'après-midi, match de foot, entre les Officiers et les Sous-officiers (1-l). Dans la soirée, suis retourné au Transit, où DOREAU m'avait remplacé.

 1-8-46: La nuit au transit, a été tout à fait calme. Ai dormi de 21 h à 6 h 30, sans avoir été dérangé, une seule fois, par un coup de téléphone intempestif. Ce matin, avons pu avoir un coupon de tissu blanc, pour nous faire faire une tenue de sortie. Des canons de 40 Bofors, sont arrivés au groupe. Voilà un bon présage. Cet après-midi, suis allé voir, dans quel état ils sont. En fin d'après-midi, match de basket, entre les Officiers et les Hommes. Avons gagné par (12-10). En ai marqué 8.

 Ce soir, panne d'électricité. Des alternateurs ont sauté, paraît-il. Il est vrai que, depuis six ans, il n'y avait rien pour les réparer.

 2-8-46: Ce matin, dès 8 h 10, j'étais sur les canons, au garage. Cet après-midi il y en a déjà deux, en état de tirer. En fin d'après-midi, match de volley, entre les Officiers et les Sous-officiers. Avons été écrasés ! Dans la soirée, mon ancienne équipe, au transit, s'est rassemblée autour du MARTELL, offert par quelqu'un. Qui ? On n'en sait rien ! Pas d'importance. Pas d'électricité non plus, ce soir. Il doit y avoir, de sérieuses réparations en cours.

 3-8-46: Réveil tardif. DOREAU ne travaille pas, moi non plus. Mon travail, au transit, semble être entièrement terminé, car je ne suis plus, sur la liste, de ceux qui doivent y prendre la permanence. Vu un match de foot, entre les Sous-officiers et les Hommes (l -l). Pas encore de lumière, aujourd'hui. SAIGON est éclairé, par quartiers. A tour de rôle, ce qui nous a permis, DOREAU, ST PAUL et moi, d'aller à l'EDEN, où l'on présentait le film" La ferme aux loups".

 4-8-46: Dimanche. J'ai paressé dans la chambre, jusque 11 h 45. A 14 h, j'étais à la Place, comme chef de patrouille. Travail assez intéressant: on envoie deux groupes au cinéma, et on en garde un, en réserve, en cas de grabuge. A partir de 23 h 30, le téléphone est resté silencieux.

 5-8-46: Terminé mon tour de patrouille, à 6 h, après une nuit parfaitement calme. Un seul ennui: les moustiques ! A l'Hôtel, jusque midi. L'après-midi: de permanence au quartier. Dans la soirée, match de basket, entre les Sous-officiers et les Hommes (12-6). Un canon de 40, de la batterie" C", a subi des avaries, probablement un long feu. Ce soir, je dors au quartier. Depuis hier, nous avons de la lumière, dans notre secteur.

 6-8-46: Ma permanence terminée, suis revenu à l'Hôtel. Vers 16 h, je suis retourné au quartier, m'entraîner au basket. Puis, nous avons fait le match de volley, contre les Hommes. Avons été battus. DOREAU étant de permanence, je suis seul, dans notre chambre.

 7-8-46: A 10 h 30, je suis allé, en détachement, dans les postes de la batterie" C", mais seulement jusqu'à GODEN. Ma mission était de savoir, ce qui s'était passé, sur le canon de 40, d'avant-hier. La vie de poste, à l'heure actuelle, est très intéressante. Calme dans la journée, du tir dans la nuit. Rentrés à 17 h 20. Match de foot, contre les hommes. Coup de théâtre: Avons gagné (3-O). Dans la soirée, le cirque ambulant est venu visiter le quartier.

 8-8-46: Dans la matinée, suis allé au garage, voir les canons. Avons porté le tissu en ville, pour une tenue blanche. Entraînement au basket. Le Capitaine OSTY a réuni les Officiers et les Sous-officiers, pour nous parler, d'un projet d'attaque V. M. (Viet minh) et des mesures à prendre.

 9-8-46: Nuit extraordinairement calme. A 4 h 45 debout. A 5 h 30 en position. A 6 h 30 fin d'alerte. Dans la matinée, suis retourné aux canons, au garage. C'est extraordinaire, ce que les canons de 40 ont subi de modifications, depuis leur création.

 Retourné au garage, dans l'après-midi. Et de quatre, de canons de prêts. Ensuite, match de volley, entre Sous-officiers et Hommes. Ce soir petite panne d'électricité, de 20 minutes. Demain matin, de nouveau en position, à 5 h.

 10-8-46: En position à 4 h 55. Toujours pas d'attaque. Quelques contrôles d'identité. Au garage, sur les canons. Le Lt GALLOIS a fait une apparition à la popote. De permanence au quartier, tandis que DOREAU est au transit. Dans la soirée, suis allé rue Catinat, chercher les photos de DOREAU.

 11-8-46: Dimanche. Sommes allés, DOREAU et moi, à la Cathédrale. Déjeuner au mess, arrosé au Châteauneuf du Pape. Après-midi à l'Hôtel. Tiens, le Restaurant est ouvert, en bas, depuis hier. GLOAGUEN, LARD et ST PAUL viennent nous rendre visite. De 19 h à 23 h, nous remplaçons ASBACHER à la permanence. De retour à l'Hôtel, discuté jusque 1 h 3O.

 12-8-46: Debout à 9 h. A 11 h, nous sommes allés voir le tailleur, pour l'essayage de nos tenues blanches. A midi, j'apprends que je suis désigné pour COMMANDER UNE SECTION DE TRANSPORTS AUT0. Je ferai, décidément, tous les métiers.


 
 

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