OreilleG100

La Baraka d'un FFL 40



22. GODEN - 2

9-11-46: Dans la matinée, nous sommes allés en patrouille, avec trois groupes de combat, dans la région de PHUOC VAN, où 200 V. M. nous avaient été signalés. Mais le renseignement devait être faux, car nous n'avons rien trouvé. Cette patrouille a donc consisté, à rendre visite à la population, en lui démontrant, que les Français respectent le MODUS VIVENDI.

 Les indigènes ne savent pas trop, ce que ces deux mots veulent dire, mais, quoi qu'il en soit, ils en sont enchantés: Les coups de fusil ne partent plus comme auparavant. En fait, chez nous, un seul coup de fusil a été tiré, depuis lors (En réponse à un coup de caillou). Donc matinée passée avec PECASTAING. (Il ne peut pas se passer des rizières !).

 A midi, LAPEZE et ACQUAVIVA sont venus déjeuner. Cette après-midi, deux groupes de combat sont partis de TAN BUU, avec pour mission de retrouver deux cargaisons de sel, bloquées par les V. M., il y a quelque temps.

 Revenus sans incident, vers 18 h, et sans avoir rien trouvé. Encore une histoire de pirates, sans doute. On commence à s'occuper sérieusement, des cérémonies du 11 Novembre, qui vont avoir lieu, à CANGIOC, avec remise de décorations. Maintenant, au poste, nous avons un pont pour véhicules, une basse-cour, avec mare aux canards, une volière et un pigeonnier.

 10-11-46: Ai commencé à préparer les ordres, pour la cérémonie du 11 Novembre.

 Puis le Capitaine OLLIVET est venu me rendre visite. Ensuite, je suis allé chercher PECASTAING, à BEN LUC. De là, nous sommes allés à CHOLON, chercher deux infirmières, invitées à déjeuner. Apéritif à BEN LUC, puis déjeuner à BINH DIEN. En fin de soirée, avons raccompagné les deux infirmières, à CHOLON. Puis j'ai raccompagné PECASTAING, à BEN LUC. Rentrés à 20 h 30.

 Des renseignements nous, sont  parvenus, parlant d'attaques de postes et de désertions, dans la nuit du 10 au 11. Nous sommes donc, ce soir, sur nos gardes. D'autre part, NGUYEN BINH est signalé, entre TAN BUU et CHO DEM. Il va falloir vérifier ces renseignements.

 11-11-46: Ce matin, je suis allé à CAN GIOC, avec une section à pied et la pièce de 25 pounders. Cérémonies aux couleurs, remises de décorations, messe, démonstrations de crabes (Véhicules amphibies).

 Apéritif à la Maison Commune, où de nombreux notables étaient rassemblés. (Dont certains de TAN BUU et de PHUOC LOI). Le tout, sous la présidence du Lt-Cel DURAND. Le Lt HENRIOT n'étant pas là, j'ai été invité à sa place, par le Cdt CHANSON. A 16 h, je revenais à GODEN, après avoir passé une agréable journée. Vers 20 h, le Lt HENRIOT est rentré de PHNOM PENH, satisfait de ses quelques jours de liberté. Je lui ai ensuite fait faire le tour du propriétaire, au clair de lune. (6 jours de commandement par intérim)!

 12-11-46: Nuit calme. Matinée paperassière. Le Lt HENRIOT est allé au groupe. Dans l'après-midi, j'ai eu la visite de PECASTAING et du Cdt CHANSON. Celui- ci nous a transmis les félicitations du Lt-Cel DURAND, pour la prise d'armes d'hier. Conversations intéressantes sur notre conduite à tenir, vis à vis de la population et des V. M.

 Ai fourni un état de mes nombreux emplois, depuis que je suis dans l'armée. A quoi cela va t-il servir ? Mystère ! Le Lt HENRIOT est rentré ce soir, en apportant une méthode Assimil (Langue anglaise). Soirée paperassière.

 13-11-46: Nuit excellente. Dans la matinée: paperasses. PECASTAING, qui allait au groupe, est passé par ici. Ce matin, on a décidé de monter un bar, dont je serai le directeur, bien entendu. (Ai des aptitudes !)

 Cet après-midi, le Lt HENRIOT est allé à SAIGON. Pendant ce temps, j'étais dans les paperasses, pour ne pas changer. Notre équipe indigène de football s'entraîne tous les soirs, en vue d'un match, qui doit avoir lieu, après-demain, à BEN LUC, contre une équipe de PECASTAING.

 Aujourd'hui, le premier petit chien de NENETTE, a été donné à LAPEZE. Un coup de téléphone est venu me prévenir, que le Lt HENRIOT était en panne à SAIGON, avec sa jeep. A 20 h, il était de retour, après avoir eu des ennuis avec son carburateur.

 Ce soir, conversations avec le Lt HENRIOT, sur notre politique, en Extrême-Orient. Politique, d'une imprécision déconcertante.

14-11-46: Dans la matinée, je suis allé voir le Délégué du Centre, au sujet des ordres précis, à donner aux notables (de TAN BUU).

 Lui, n'a rien de précis. Lui, non plus ! En rentrant, le Lt ROMETTE était venu nous voir. De nouveau : grandes conversations, sur la politique française actuelle. Pas très brillante, cette politique, TANDIS QUE LES VM PRENNENT DE PLUS EN PLUS D'    IMPORTANCE, MAINTENANT, QUE NOUS N' AVONS PLUS LE DROIT DE LES CONTRER. Tandis qu'eux n' HESITENT PAS, à chaque instant, à VIOLER LE MODUS VIVENDI. Pendant ce temps, notre propagande officielle est inexistante.

 Cette propagande, qui serait indispensable (On s'en rend compte, quand on est sur le terrain), nous essayons, malgré tout, de la faire nous mêmes, tout en nous rendant bien compte, de notre inefficacité matérielle. Le Lt HENRIOT est allé au groupe, cet après-midi (rentré à 18 h). Vu LAPEZE également. Paperasses.

 15-11-46: JOURNEE EXTRAORDINAIRE, ET QUI AURAIT PU ME COUTER CHER. Ce matin, enlèvement des drapeaux V. M., posés dans la nuit, dans presque tous les villages. Patrouille à LONG DINH, LONG CANG, par BEN LUC et PHUOC VAN. Vers 10 h, j'apprends, que BINH CHANH est pavoisé.

 J'y suis donc allé, avec un groupe de combat léger. (Sans F. M.). Tout y était calme, aucun drapeau. Je suis donc allé sur la route de TAN BUU. Avons fait enlever quelques drapeaux, sur la droite, puis on s'est rendu, sur la gauche, où de nombreux drapeaux flottaient effrontément. C'est alors, que nous sommes tombés, sur une réunion V. M., comprenant 250 personnes.

 Pourparlers au sujet de l'interdiction du pavoisement, et des rassemblements. COUP DE THEATRE: AU LIEU DE NOUS RECEVOIR A COUPS DE FUSIL (Une trentaine de repérés par un autre groupe, après notre départ) LES VOILA QUI NOUS INVITENT, A PRENDRE LE THE, ET LES PETITS GATEAUX !

 Il valait mieux ne pas refuser ! Pour eux, et aussi pour nous, car nous étions, réellement, trop peu nombreux. Conversations, au cours desquelles, j'ai parlé du Modus Vivendi, tel que nous le comprenons, des atrocités, des horreurs de la guerre, qui ne rapportent jamais rien aux honnêtes cultivateurs, de notre désir de respecter le MODUS VIVENDI, mais aussi, notre ferme volonté, de le faire respecter etc.. Puis je me suis excusé, adroitement, prétextant mes nombreuses occupations, que chacun semblait comprendre. Tout en leur demandant de se disperser, après mon départ.

 ET VOILA COMMENT ON SORT D'  UN GUEPIER ! A mon retour, le Lt HENRIOT n'en revenait pas. Dans l'après-midi, nous sommes allés à CAN GIOC, tous les deux, en jeep, (Quelques ennuis mécaniques), raconter au Cdt CHANSON, les évènements de la matinée. Lui aussi, était plutôt éberlué !

 Enfin nous sommes revenus à la nuit tombante. Le Chef du groupe de combat, qui avait suivi la scène, depuis la route de TAN BUU, m'a dit que, dès mon départ, les membres de la réunion sont partis du hameau, où ils n'avaient pas le droit de se trouver, et ont pris la route de l'Ouest.

 A minuit, nous partons en patrouille de police, avec cinq groupes de combat, et cinq camions, sur les routes de TAN BUU, CHO DEM et, peut-être, plus loin, vers CHOLON.

 16-11-46: Je viens de rentrer. Il est 4 h. A minuit 15, BEN LUC est arrivé avec deux groupes de combat, PHUOC VAN avec un autre. Pris un groupe à GODEN, puis nous sommes partis. A BINH CHANH, un groupe de combat de BINH DIEN nous attendait. Sommes allés à TAN BUU, puis jusque BINH DIEN en camion. A pied, de BINH DIEN à CHO DEM et retour. Enfin, nous sommes rentrés, chacun de notre côté. C'est ce qu'on appelle, un déploiement de forces. Et maintenant, au dodo. Debout à 9 h 45.

 A 10 h 30, départ de notre patrouille (7 groupes de combat) à l'endroit, où j'avais découvert la réunion V. M., hier matin. Aujourd'hui, tous les hommes sont partis. La bande a disparu. L'un des chefs, avec qui j'ai discuté hier, n'était rien moins que GIOC, un type que j'aimerais bien rencontrer, dans d'autres circonstances. Rentré à 13 h.

 Dans l'après-midi, le Cdt CHANSON est venu nous voir. Le Lt HENRIOT est reparti quelque part. Mlle ROUSSEL est venue : faire son tour du samedi, ainsi que le Dr RAYNAUD. PECASTAING est venu, vers 17 h, mais pas pour longtemps. Le Lt HENRIOT est rentré à la nuit. Il apportait trois nouveaux disques, dont le slow" Symphonie" (de réputation mondiale).

 Cela nous a rappelé la Côte d'Azur. PECASTAING est revenu dans la soirée. Il était à la recherche d'un véhicule qui faisait, paraît-il, des signaux. Rien de grave. J'ai sommeil ce soir.

 17-11-46: Dimanche. Nuit excellente. Debout à 8 h. PECASTAING est passé par ici. Il part pour DALAT, en permission. Le Lt HENRIOT est allé à SAIGON ce matin, comme tous les dimanches. Pendant ce temps, je fais de la musique. Excellent pour adoucir les moeurs. Le soleil est resplendissant.

 La saison sèche va cependant causer quelques désagréments, tels que la rareté de l'eau et, par suite, le travail incessant des citernes. Le Lt HENRIOT est rentré de SAIGON pour déjeuner. BESSE et BARE sont en permission, jusqu'à ce soir. Après-midi musicale.

 En fin d'après-midi, apéritif offert par le Directeur de notre bar (Ce n'est que moi) pour l'inauguration de notre bistrot à bon marché. Les enfants annamites, qui vivent près de nous, ont tous, des prénoms français. J'aime beaucoup m'amuser avec eux. Ils ont une manière particulière de m'appeler" ieut'nant".

 Le notable de PHUOC LOI est venu nous demander protection, pour cette nuit. A la Maison commune, quelques musiciens fêtent la mort du Docteur TINH, qui s'est suicidé, il y a quelques jours. Ici, la mort se traduit par une fête. Le culte des morts est extraordinaire en INDOCHINE. A 10 h, je suis allé au village, en jeep, faire une patrouille. Avons été invités par les notables. Les musiciens ont alors joué" La Madelon" !

 Enfin tout est calme. La nuit prochaine, je ferai une patrouille, toutes les deux heures. En jeep, ce n'est pas fatigant. La prochaine est à minuit.

 18-11-46: Des patrouilles en jeep à 2 h, 4 h, 6 h. Rien d'anormal.

 Debout à 9 h. A 10 h, je commandais un détachement, chargé de rendre les honneurs à la Maison Commune, (Service mortuaire bouddhiste) en l'honneur du Docteur TINH. Ensuite apéritif, avec les notabilités, à la Maison Commune. Le Lt HENRIOT, qui était allé ce matin à SAIGON, est revenu pour déjeuner, apportant de nouveaux disques (de danse).

 A 15 h, nous sommes partis en patrouille (7 groupes de combat), du côté de PHUOC VAN. (LONG DINH) (LONG KHE). Le premier pont a été jeté à l'eau, par les V. M., il y a longtemps. (Le passage est devenu plutôt acrobatique) (Photos prises par le Lt HENRIOT). Quelques drapeaux V. M. Des passages parfois mauvais, en particulier avant LONG KHE.

 En somme, une patrouille plutôt pacifique, tout en étant une démonstration de force. On occupait en effet 700 mètres de route, ce qui est imposant. Rentrés à 18 h, en camion. Tous les hommes chantaient, ce qui montre que leur moral est demeuré excellent. Soirée musicale. (Symphonie, Honolulu, etc). Un nouveau courant d'opinion, "procochinchinoise, " se révèle de nouveau, dans les journaux. C'est extraordinaire, ce qu'ils peuvent être changeants.

 19-11-46: Ce matin, nous sommes partis de BEN LUC, avec 7 groupes de combat. Piste et passerelle de THANH HA. Patrouille terminée à TAN BUU, à 10 h environ. Le Capitaine OLLIVET est venu déjeuner avec nous.

 Il adore la musique. Il est donc reparti satisfait. Dans l'après-midi, le Lt HENRIOT et moi, sommes partis pour SAIGON, mais une fuite d'huile nous a empêchés, d'aller plus loin qu'AN LAC. A BINH DIEN, LAPEZE est toujours fort occupé. La devise de son poste est:" Râleurs mais bosseurs !". Rentrés à GODEN, vers 19 h. Soirée musicale. Les ordres pour demain sont donnés. Il est 23 h. Tout va bien.

 20-11-46: A 7 h, debout. A 8 h, nous sommes partis à 4 groupes de combat, de BEN LUC. Sur les 2 LCVP, nous avons remonté le Song BEN LUC, jusque TAN BUU, après un arrêt au confluent du Rach RIT. Rentrés à 10 h 30. Visite du Lt ROMETTE. Le Lt HENRIOT a rapporté quelques disques supplémentaires.

 Dans l'après-midi, nous sommes repartis, à quatre groupes de combat, de TAN BUU, toujours sur les 2 LCVP. Avons remonté, assez loin, le KINH SANG. Au retour, nous nous sommes arrêtés, au village de TAN NHUT. Avons rencontré des V. M. armés. Après une courte discussion, nous sommes repartis sur BINH DIEN. Le Lt SANTINI est, enfin, venu nous voir, ce soir. Donc agréable soirée musicale, mais en rageant contre le Modus Vivendi, qui nous a empêchés, de faire un beau coup.

 21-11-46: Debout assez tôt, après un réveil en musique. Le Général VALLUY est venu visiter notre poste. Il était accompagné de l'Administrateur JOSA. Dans l'après-midi, nous sommes allés à 4 groupes de combat, en LCVP, de BINH DIEN à BEN LUC et retour. Distribution de tracts, sur l'arroyo. Forte circulation. Ce soir, préparation de l'opération de demain matin.

 22-11-46: A 8 h, nous sommes partis pour TAN NHUT. (Même endroit qu'avant hier) avec les 2 LCVP et 10 groupes de combat. CHERON était venu, avec sa section. Notre mission était de prévenir les V. M., que leur présence dans ce village, ne serait pas tolérée, par l'autorité française.

 Les guetteurs ont été aperçus, très rapidement. En débarquant à TAN NHUT, nous avons constaté que les V. M. étaient partis du village. Ils se sont mis, en position de combat, de l'autre côté du Kinh Sang, à 50 mètres environ de la rive puis, notre menace se faisant sentir, ils sont partis, à vive allure, vers le Nord. (Environ 400 à 500). Pendant ce temps, CHERON et ACQUAVIVA arrivaient, par la piste. Ils ont également aperçu une trentaine de fuyards. Nous avons donc eu tout le loisir, de distribuer nos tracts, et de communiquer notre ultimatum, selon lequel, nous ne voulions plus voir les V. M., à TAN NHUT.

 Rentrés à 11 h. CHERON a déjeuné avec nous. Dans l'après-midi, le Lt HENRIOT était allé à CAN GIOC. Pendant ce temps, je" gardais la maison". Le Dr RAYNAUD est venu faire un tour. A 21 h, nous sommes partis, en patrouille motorisée, à PHU LAM, TAN BUU et PHUOC VAN. Rentrés à 0 h 30. Puis je me suis occupé, des  compte- rendus divers. Demain, le Lt ROMETTE recevra la collecte de tracts de cette patrouille.

 23-11-46: Il y a deux ans STRASBOURG était prise. Ce matin, réveil assez difficile. Dans la matinée, le Lt HENRIOT et moi, sommes allés à SAIGON. Le jet d'eau, face à la mairie et au théâtre, fonctionne.

 Les petits indigènes s'amusent à se baigner dans les bassins, dans une tenue, plus que légère ! Rentrés à 13 h. Dans l'après-midi, sieste, (Ce qui est assez rare), mais très courte, en raison des coups de téléphone, qui me réclament assez souvent. Mlle ROUSSEL est venue nous voir, comme tous les samedis. Le modus vivendi est violé, un peu trop souvent, par les V. M. (Une cinquantaine en armes, ont été repérés, ce matin, se dirigeant vers PHUOC LY.) Il ne tardera pas à être dénoncé, probablement.

 24-11-46: Nuit excellente et reposante. Je ne suis pas sorti de la journée. Repos le plus complet, ce qui n'était pas de refus, après la semaine assez mouvementée, que nous venons de passer. La musique ici, est la principale distraction. Lorsque le classique devient lassant, un peu de swing, des tangos, slows, etc. Les 2 LCVP, dont nous nous sommes servis, cette semaine, sont repartis pour CAN GIOC. Dommage, ils nous étaient réellement utiles. Grâce à eux, il nous a été facile, d'aller voir ce qui se passe sur le KINH SANG. (Repaires actuels des grosses bandes, évaluées à plus de 2000 V. M.).

 25-11-46: Réveil normal, après une nuit excellente. En fin de matinée, je suis allé, en Jeep, à CHOLON, avec le Lt HENRIOT. Histoire de relève du poste de BINH CHANH. Dans l'après-midi, je me suis occupé de cette relève. CREIGNOU en est le chef de poste, FAVEN son adjoint. Que les V. M. se tiennent bien, si les hostilités reprennent.

 Dans la soirée, une petite alerte. Le Lt HENRIOT, en revenant du groupe, avait cru voir une réunion clandestine, du côté d'AN LAC (Coin insalubre). Y suis allé, avec un groupe de combat. Rien d'anormal. Un exercice d'alerte en quelque sorte. Soirée musicale et paperassière.

 Demain, il y a une opération. C'est LAPEZE, qui y va. Je continuerai donc à me reposer, s'il n'y a pas d'autre incident. LE MODUS VIVENDI S' AVERE DE PLUS EN PLUS PRECAIRE, avec les histoires actuelles au TONKIN, où la FRANCE semble en avoir assez.

 26-11-46: Réveillé à 5 h 15, par le départ du groupe de combat de GODEN, qui part pour BEN LUC. LAPEZE est en opération, ce matin, avec quatre groupes de combat, sur 2 LCVP, et" LA FOUDRE" est à leur disposition (sérieux appui de feux !). Le Lt HENRIOT est allé à SAIGON, dans la matinée.

 Pendant ce temps, je m'occupe comme je peux. Musique et aussi, hélas, paperasses. Grosse commande de photos, d'ici, mais aussi de la fête DES EAUX, à PHNOM PENH. (Tout le monde en veut !). Retour du Lt HENRIOT, vers 12 h 30, mais il est reparti dans l'après-midi.

 Les groupes de combat sont rentrés de LY VAN MANN, vers 17 h. Le Lt HENRIOT est rentré à 18 h 10. Quelques coups de canon ont été entendus du côté de TAN NHUT. Quelques rafales de F. M., dans la direction de CAN GIOC.

 Soirée musicale. Discussion avec le Lt HENRIOT, sur la situation politique en INDOCHINE. Trois ou quatre divisions de plus ici, ne seraient pas de refus, et permettraient à la population, de moins craindre les V. M., dont les méthodes sont expéditives, très convaincantes." Fais ce que je te dis, sinon tu ne mérites pas de vivre, alors disparais !" (Et c'est l'avis de mutation à Bouddha ! et la promenade posthume au gré des eaux).

 27-11-46: Nuit très calme. Ce matin, j'ai donné quelques tracts à LAPEZE, qui devait convoyer les deux LCVP, de BEN LUC à BINH DIEN. Dans la matinée je suis parti, en jeep, avec le Lt HENRIOT. Arrêt à BINH CHANH. Avons déjeuné à CAN GIOC, avec le Cdt CHANSON, ROMETTE et LE GLOANEC. De là, nous sommes repartis vers CHOLON et SAIGON. Achat de disques. Arrêt au BAYON.

 Sur le chemin du retour, arrêt à GENIE CHOLON, puis à BINH DIEN. Conversations sur notre nouvelle politique. Rentrés vers 20 h 30. Soirée musicale et paperassière. De 23 h 45 à 0 h 10, patrouille dans le village (En Jeep: RAS).

 28-11-46: Avais encore sommeil, ce matin, en me réveillant. Les ordres de détail sont arrivés à 8 h, pour la patrouille de la matinée. Depuis que BINH CHANH nous est revenu, c'est à dire depuis lundi, nous disposons de huit groupes de combat. Nous sommes  allés, avec ces groupes à LONG DINH, AP REY (Où nous avons mis en fuite, une bande importante), LONG CANG, AP BEN DO (Nombreux fuyards). Arrivée à PHUOC VAN, après une marche de 16 Kms.

 Rentrés vers 13 h. Suis allé reconduire les groupes de combat de BINH CHANH et de TAN BUU: Après-midi: sieste. Un peu fatigué, car la matinée a été assez chaude. Le Lt HENRIOT, parti ce matin, a eu des ennuis avec sa jeep, ce qui fait, qu'il n'est pas rentré avant 20 h. (Mais en apportant de nouveaux disques).

 Soirée musicale. Bientôt minuit.

 29-11-46: Prêts à 7 h. Les ordres sont arrivés, 1/4 d'heure plus tard. A 7 h 30, nous étions à 1 Km au Sud de BEN LUC, formant un bouchon de 1 Km de long, avec trois groupes. Avons aperçu quelques V. M. armés, mais trop loin pour nous. Rentrés vers 10 h. Hier soir, le caporal DANG, du pont de chemin de fer de BINH DIEN, a déserté, en emportant deux fusils. On ne peut donc pas avoir une confiance totale dans nos indigènes, dont CERTAINS ONT PEUR, POUR LEURS FAMILLES. Où sont mes NOIRS de FORT LAMY ?!

 Cet après-midi, le Lt HENRIOT est parti, pour diverses courses. Visite du Capitaine HERBELIN. Le Lt HENRIOT n'est rentré, que dans la soirée. CREIGNOU et BONNAVAL sont venus me parler d'un coup à monter. Ce soir, intervention à 3 Kms au Sud de BEN LUC, puis patrouille, aux alentours du pont de chemin de fer, de BINH DIEN.

 30-11-46: A 7 h 30, départ pour BINH CHANH. De ce poste, nous sommes partis, avec huit groupes de combat, pour lancer un ultimatum, dans la région de TAN TUC, où de nombreux V. M. étaient signalés. A notre approche, de nombreux fuyards ont été aperçus, mais, nous n'avons vu personne  en  arme. Heureusement pour eux. Rentrés à BINH DIEN, par la piste TAN BUU -BINH DIEN. A 13 h, nous étions de retour à GODEN. ALBIS est venu payer la solde (A été bien reçu !).

 Dans l'après-midi, je suis allé à SAIGON, avec le Lt HENRIOT. Courses diverses, en particulier les photos, que nous avions commandées. Un petit tour au BAYON et à SAIGON PALACE. A 20 h, rentrés à GODEN. D'après les journaux de FRANCE, on semble vouloir s'occuper sérieusement de la question indochinoise, et des renforts, sont  signalés, à brève échéance. Enfin ! Ce n'était pas trop tôt. Ici, pour notre part, nous recommençons à montrer nos dents. SEULE SOLUTION, AVEC DES GENS DE MAUVAISE FOI, COMME LES VM.

 1-12-46: Dimanche. Nuit calme. Journée de tout repos. Grasse matinée relative. Un peu de paperasses. Musique surtout. J'apprends que le grand-père ISIDORE DEROBERT est mort, le 26-1O-46. Il le disait bien, qu'il ne me reverrait plus. Il me laisse l' EXEMPLE D' UN HOMME D' HONNEUR, ayant consacré toute sa vie, au pays, et à sa famille.

 Le Lt HENRIOT, parti ce matin, est rentré à 15 h, tandis que je dormais comme un ange. Soirée très paperassière: Rapport sur le moral.

 2-12-46: Frais, dispos, bien reposé ce matin. Suis resté dans les paperasses, tandis que LAPEZE est en patrouille à AN PHU TAY, avec 7 groupes de combat. La patrouille de ce matin, ayant été très fatigante, aucune sortie n'est prévue pour demain. Ici paperasses.

 3-12-46: A 10 h, le Lt HENRIOT et moi, avons brusquement décidé, d'aller voir nos voisins du Sud. Sommes donc allés à THU THUA, où nous avons rencontré le Lt-Cel DURAND, et où, nous avons déjeuné. Puis, dans l'après-midi, nous sommes passés de l'autre côté de la RC 16, jusqu'à BINH TINH. (Où j'étais déjà allé un dimanche, chercher deux groupes de combat, de PECASTAING). Retour vers 15 h 30.

 Les groupes de combat, qui avaient été demandés, de toute urgence, dans le début de l'après-midi, sont revenus vers 17 h. Un ACCROCHAGE SERIEUX avait eu lieu, dans la région d'AP PHU. Le Lt CAU a été blessé. Ce soir, on a appris qu'on lui avait enlevé un rein. Enfin, on a l'espoir de le sauver, et c'est là, le principal. CAU est réellement un chef de section d'intervention de tout premier ordre.

 4-12-46: STE BARBE: Fête des Artilleurs et des Armes savantes. Les VM nous, ont laissés tranquilles, pour la fêter, aussi dignement que possible, dans un poste. A midi, apéritif général. (Les partisans étaient également conviés). Chants divers. Le Lt HENRIOT, qui était allé au groupe, a déjeuné là-bas, et n'est rentré que dans la soirée.

 5-12-46: Je me suis brusquement réveillé, à 4 h. J'avais soif. Après un petit tour au grand air, me suis recouché jusque 7 h. Matinée dans les paperasses. Le Lt HENRIOT est parti pour SAIGON et CHOLON.

 Appris, cet après-midi que PECASTAING était cité à l'ordre de la Brigade. Sensationnel et bien mérité. ACQUAVIVA et son interprète, CREIGNOU et DUMAS sont venus nous voir. Le Lt HENRIOT est rentré à 16 h. Nouveaux disques: Symphonie inachevée. HOACH est élu Président du Gouvernement Provisoire, de la COCHINCHINE. Soirée musicale et paperasses.

 6-12-46: On est venu me réveiller à 1 h, mais rien de grave: patrouille amie sur la RC 16. (SAIGON -MY THO). Dans la matinée, suis allé à SAIGON, avec le Lt HENRIOT. Avons passé la commande d'un stylo REYNOLDS (A bille).(Le PREMIER !)

 En revenant, nous sommes passés par l'infirmerie du 10eme RAC. Le Lt HENRIOT s'est fait piquer (TAB, Choléra, Typhus). Moi, je suis encore en règle, jusqu'à l'année prochaine). Après-midi: paperasses. Ce soir, je suis allé à CHOLON, chercher PECASTAING, qui revient de DALAT. Le Lt HENRIOT s'est couché de bonne heure, fiévreux, avec ses piqûres.

 7-12-46: Journée très calme, donc travail de bureau. En écoutant" Dans le jardin d'un monastère", notre chienne NENETTE, voulait à tout prix, savoir où étaient les oiseaux, qu'elle entendait, et qu'elle ne voyait pas ! Elle s'est vengée sur une souris ! Soirée magnifique, légèrement fraîche. La lune est là, remerciée par nos sentinelles.

 8-12-46: Dimanche. A 4 h, me suis réveillé en sursaut, à la suite d'un rêve de rencontre avec les VM. Cela m'a tellement réveillé, que je suis allé faire un tour, autour du poste. Lune magnifique, calme complet. Un peu de causette avec les sentinelles. Puis me suis recouché jusque 7 h.

 Matinée musicale, tandis que le Lt HENRIOT est allé à SAIGON. Les photos prennent place dans l'album. Dans l'après-midi, quelques visites: BONVOISIN, un Lt du Train, BEAUGENDRE et D' ABBOVILLE. Cordialité parfaite. Les chiens se sont révélés d'un excellent divertissement. En fin d'après-midi, je suis allé à TAN BUU, en jeep. Passé par le poste de BINH CHANH, en revenant à GODEN. Soirée musicale. Les ordres pour demain sont transmis.

 9-12-46; Après une nuit de 6 h, nous étions à 7 h à BEN LUC.

 Grande patrouille, à huit groupes de combat, dans la région d'AN THANH. Des fuyards vers le Nord, aperçus par PECASTAING. A part cela, promenade des plus tranquilles, jusque 11 h. Tandis que le Lt HENRIOT est allé à SAIGON, dans l'après-midi, suis resté au poste, dans les compte- rendus. Reçu la visite d'un Lt, qui remplace provisoirement CHERON. Dans la soirée, amusante patrouille en autocar, sur la RC 16, de TAN BUU jusque THU THUA.

 10-12-46: Debout à 8 h 30. Matinée et après-midi au poste. Le Lt HENRIOT a ramené CHERON, qui a déjeuné avec nous. Le Dr RAYNAUD est également venu nous voir. Tard dans la soirée, avec le Lt HENRIOT, je suis allé au poste de BINH DIEN, (Essai de la mitrailleuse sur le nouveau mirador), et à CHO DEM. La piste nous cause bien des soucis. Nous avons beau la réparer, les ornières se reforment, comme à plaisir.

 11-12-46: PECASTAING est passé par ici, tôt ce matin. Dans la matinée, visite du Capitaine HERBELIN, qui est venu nous parler de l'opération de demain. Paperasses. Dans l'après-midi, tandis que le Lt HENRIOT est à SAIGON, le camion de GONZALES a bien failli se renverser, devant le poste.

 Voilà qui aurait été vexant. Dans la soirée, le Lt HENRIOT est revenu, avec trois nouveaux disques. On a attendu LAPEZE, puis nous sommes partis en patrouille, jusque PHUOC VAN (Réparation de la ligne téléphonique). Suis reparti en patrouille, avec DUFFAUD, à minuit.

 12-12-46: Cérémonie indigène de la prestation de serment, au nouveau Gouvernement Cochinchinois. (HOACH). Dans la matinée, opération dans la région de LONG CANG, LONG SON. En place à partir de 6 h 30. Quelques coups de feu: LES PREMIERS QUE NOUS TIRONS, DEPUIS LE 30 OCTOBRE, et ce n'est probablement pas fini, car HO CHI MINH commence à nous énerver, sérieusement. En tout cas aujourd'hui, un guetteur VM est probablement passé dans l'autre monde. PECASTAING et LAPEZE étaient avec moi.

 On forme une belle équipe tous les trois ! Rentrés à 11 h. A 14 h, je suis allé avec le Lt HENRIOT, CREIGNOU et DUMAS à la fête du village. Fête qui respirait, étrangement, le temps de paix (Cette chose bizarre, après laquelle on n'arrête pas de courir !) A 17 h, je suis allé, en Jeep, à SAIGON: courses diverses, de nouvelles photos en particulier. Puis j'ai reconduit DUMAS à BIN TRI DONG. Soirée musicale. Bientôt minuit. La lune se lève.

 13-12-46: Dans la matinée, visite du Lt-Cel DURAND et du Cdt CHANSON. Sommes allés à BEN LUC, PHUOC VAN, BINH CHANH, TAN BUU et BINH DIEN. A 12 h 45, le Capitaine HERBELIN est arrivé. Avons déjeuné ensemble, le plus agréablement du monde. PECASTAING et LAPEZE étaient également présents. En fin de soirée, PECASTAING est revenu nous voir. Ayant des renseignements, à nous communiquer, il en a profité, pour faire une patrouille sur la route coloniale.

 14-12-46: Bien reposé ce matin. Les nuits sont remarquablement fraîches, depuis quelques jours, et nous savons l'apprécier.

 Le Lt HENRIOT est allé à SAIGON: Revenu avec des disques. Dans l'après-midi, les notables sont allés à CHOLON. Pendant ce temps, le Lt HENRIOT et moi, sommes allés à CHO DEM. ACQUAVIVA fait du bon travail, au point de vue aménagement du poste. Ai fait l'acquisition d'un stylo américain REYNOLDS. Avantage: plus de pâtés d'encre. Inconvénient: pour l'instant, on ne peut pas dire, qu'on peut bien écrire avec ça !

 15-12-46: Vers 2 h, je suis allé faire une patrouille, en jeep, dans le village, plongé dans le plus grand calme. A 8 h, debout. Dans la matinée, suis allé à PHUOC VAN, pour obtenir quelques renseignements.

 Dans l'après-midi, suis resté au poste, car LAPEZE et PECASTAING sont allés à SAIGON. La musique est ma principale distraction. C'est réellement bien, d'avoir de beaux disques. Retour des permissionnaires, ils paraissent satisfaits de leur journée. Ce soir, LAPEZE et PECASTAING sont rentrés. A 1 h, je fais une petite patrouille en jeep, dans le village: RAS

 16-12-46: Journée passée en jeep. Ce matin, avec le Lt HENRIOT, visite à l'Inspection primaire à CHOLON, puis au GENIE, puis à SAIGON, acheter de nouveaux disques. Arrêt obligatoire au BAYON, (Une glace !) Rentrés vers midi. Dans l'après-midi, sommes repartis, d'abord voir BEAUGENDRE à LONG HOA, puis à CAN GIOC, où nous avons vu le Capitaine OLLIVET, le Capitaine HERBELIN et le Lt ROMETTE. Rentrés vers 18 h 30. Ce soir, préparation des ordres pour demain matin. Puis paperasses.

 17-12-46: Dans la matinée, opération du côté de LONG HIEP. Rien de spécial. Le Lt ROMETTE est venu déjeuner. Dans l'après-midi, je suis allé à TAN BUU, BINH CHANH, BEN LUC et PHUOC VAN, préparer une nouvelle commande de photos.

 18-12-46: Un peu fiévreux, jusque midi, la tournée d'hier soir, ayant été un peu fatigante. Avons perçu des drapeaux cochinchinois, en papier. Dans l'après-midi, on les a collés, le long des routes. Au début de la soirée, le Lt HENRIOT et moi, sommes allés à BEN LUC.

 Ce matin, visite de l'Administrateur JOSA. Ce soir, patrouille jusque BINH CHANH. Avons tiré quelques fusées éclairantes, pour voir clair. (Elles ont été faites pour cela, et se révèlent très efficaces).

 19-12-46: Nuit un peu courte. Ce matin, patrouille de propagande, dans la région de TAN TUC. Rien d'anormal. Cependant l'état sanitaire des paysans laisse à désirer. (Peur des représailles VM, s'ils viennent se faire soigner). Dans l'après-midi, je suis resté au poste, tandis que le Lt HENRIOT était à CHOLON et PECASTAING en opération, du côté de TANAN. Cette dernière patrouille est rentrée indemne à 21 h 30. Quelques Français, hors de combat, aujourd'hui: 1 tué.

 20-12-46: Ce matin, LAPEZE est parti en opération, dans la région de TANAN, avec trois groupes de combat de chez nous. Il est rentré vers 12 h 30. Quelques cadavres ont été retrouvés. LAPEZE et le Lt HENRIOT sont allés déjeuner à CAN GIOC.

 Pendant ce temps, je" garde la maison". Dans le début de la soirée, j'apprends qu'une bande de 100 VM environ, n'est pas très loin de notre poste. Il est minuit maintenant, et nous n'avons pas encore été attaqués. C'est d'ailleurs plus prudent pour eux, car tout le monde est sous pression. Au dodo car demain, on va s'occuper de les déloger, s'ils sont encore là.

 21-12-46: Ce matin, à 7 h, départ de notre patrouille (Quatre groupes de combat à l'Ouest d'ici). La bande s'est délogée d'elle même, sans que nous ayons eu, à faire usage de nos armes. Rentrés vers 9 h 30. Ensuite, on m'a amené un chef de groupe VM, de la région de LONG HIEP. Au TONKIN, tout ne va pas très bien, pour les V. M. Ils comprendront peut-être, qu'avec les Français, il n'est pas prudent de jouer au petit soldat.

 L'opération montée par le 10eme RAC, du côté de CAN GIOC, a rapporté des revolvers, trois mitraillettes et 10 fusils. Il est confirmé, que les Français prennent entièrement possession de HANOI, et que HO CHI MINH ET SON GOUVERNEMENT SONT EN FUITE. Il finira bien par lui arriver un accident ! A midi, le Père LEGER et le Capitaine DENINGER sont venus déjeuner avec nous.

 22-12-46: C'est dimanche, mais nous avons, tout de même, trois groupes de combat en réserve, qui ne seront décommandés, que dans l'après-midi. Dans la matinée, me suis occupé de musique et de paperasse. Dans l'après-midi, je suis allé, avec le Lt HENRIOT, à CHO BAHOM. Au retour, nous nous sommes arrêtés à BIN TRI DONG. Les postes travaillent activement, aux décorations de la fête de Noël. En fin d'après-midi, réunion de la commission du bar. Dans la soirée: paperasses.

 23-12-46: Grasse matinée; puis paperasses. L'adjudant DENIZOT est relevé de BEN KHE. Maintenant, il va prendre le poste de CHO BAHOM. N'ai pas bougé du poste, de toute la journée. RAS.

 24-12-46: Dans la matinée, je suis allé à CHO BAHOM, procéder à la relève. DENIZOT en devient le chef de poste. Activité fébrile, dans tous les postes, en vue du concours de l'après-midi. Dans l'après-midi, le Cdt OSTY est venu assister à cette revue. Il a paru absolument épaté. Les prix ont été décernés, dans l'ordre, à PHUOC VAN, BINH DIEN, GODEN, BIN TRI DONG, TAN BUU, CHO DEM, BEN LUC, BINH CHANH. Dans la soirée, chants, jusque vers minuit.

 25-12-46: Repas de Noël jusque 2 h. On a l'impression que nos hommes sont fatigués. Enfin, ce repas en commun, a été tout à fait réussi. C'  EST MON 7eme NOEL, LOIN DE LA MAISON ! A 9 h 30, debout. A midi, je suis allé déjeuner à TAN BUU. Le vin perçu récemment, est épatant. Et semble également faire son effet ! Tournée de propagande dans le village, puis je suis rentré, vers 19 h. Dans la soirée, patrouille entre GODEN et BINH CHANH. RAS. Puis paperasses.

 26-12-46: Matinée dans les papiers. Dans l'après-midi, je suis allé à BEN LUC. PECASTAING n'allait pas très bien. Dans la soirée, suis retourné à BEN LUC, avec le Lt HENRIOT.

 Vers 21 h 30, LAPEZE est venu, avec un groupe de combat. Sommes allés jusque LONG KHE. LES VM VENAIENT DE METTRE LE FEU, A L' ECOLE ! Comme on le voit, le MODUS VIVENDI est plutôt vacillant. IL AURA PERMIS AUX VM DE SE RENFORCER, DE SE REORGANISER. Mr MOUTET, ministre des colonies, est venu en INDOCHINE. Fin de soirée dans les papiers. Déjà 1 h.

 27-12-46: Debout à 7 h 45. Brusquement, la visite du Colonel DELEUZE a été annoncée. Le Lt-Cel DURAND est arrivé, inopinément, puis il est reparti. Il croyait que c'était le Colonel CHANSON ! Enfin, à 9 h 30, le Colonel DELEUZE est arrivé. Visite des postes de BINH DIEN, CHO DEM, BINH CHANH, TAN BUU, PHUOC VAN et BEN LUC. Il a paru satisfait. (Impression de solidité !).

 Dans l'après-midi, tandis que le Lt HENRIOT était à SAIGON, je suis resté au poste. Me suis occupé d'envoyer à l'Hôpital de CHOLON, un jeune Annamite, blessé par une grenade, à LONG KHE. Dans la soirée, BEN LUC ayant signalé un feu, entre GODEN et PHUOC VAN, je suis allé, avec un groupe de combat, jusqu'à ce dernier poste. Rien d'anormal. Achevé ensuite de dîner: les émotions ça creuse ! Puis paperasses.

 28-12-46: Nuit épatante, presque froide. (Tout est relatif). Dans la matinée, j'ai reçu les notables du village, ainsi que le Chef de Canton. On fait installer un hall d'information. Ce matin, PECASTAING est allé faire une patrouille, avec deux groupes de combat, dans la région de LONG DINH. Dans l'après-midi, le Chef MONTPARLE est allé dans la région d'AN PHU TAY. Le Lt HENRIOT, parti ce matin, vers 10 h 30, est rentré vers 17 h.

 Deux A. M. sont mises à notre disposition, jusqu'à nouvel ordre, des attaques VM étant signalées. A minuit, PECASTAING est arrivé ici, après avoir effectué une patrouille, entre BEN LUC et GODEN.

 29-12-46: Nuit assez agitée. Le pont de LONG HIEP, a été détruit, par les VM. Qui paiera la casse ? En fin d'après-midi, réglage du 25 pounders, dans les alentours du pont de BEN LUC. Le Lt DARDEAU a déjeuné avec nous. Ce soir, nous sommes allés en patrouille, jusqu'au pont de LONG SON. Ensuite paperasses. Les 2 A. M. restent à notre disposition, ce soir.

 30-12-46: Réveil assez difficile, ce matin. Paperasses. Visite des notables. Les A. M. sont reparties à 9 h. Le Lt HENRIOT est allé à CHOLON, puis à TANAN. Ce matin, on a fait une patrouille du côté de LONG HIEP. RAS. Une année se termine. Depuis que je suis dans l'armée: guerre, guerre et encore la guerre, et ce n'est probablement pas fini, car LE MODUS VIVENDI SEMBLE TERMINE !

 Les A. M. sont revenues à 18 h. (Nous, on aime bien ça). Elles doivent rester quatre ou cinq jours.

 En fin d'après-midi, je suis allé voir PECASTAING à BEN LUC. A peine rentré, je suis reparti, faire une patrouille dans le village, avec le Lt HENRIOT. Un peu plus tard, PECASTAING patrouillait entre BEN LUC et TAN BUU, et LAPEZE entre BINH DIEN ET PHUOC VAN.

 Vers 23 h, on nous signale une certaine activité, au Sud du pont de BEN LUC. J'ai tiré aussitôt un coup de 25 Pounders qui, paraît-il, a provoqué une débandade. (Effrénée). Nouvelle patrouille, avec les A. M. jusqu'à ce pont. Tout était de nouveau calme. On a cependant arrosé le coin au F. M. Paperasses. Il est déjà 1 h.

 31-12-46: Le restant de la nuit a été délicieusement calme. De plus, nuit fraîche ! Dans la matinée, un partisan ayant été assassiné, du côté de BIN TRI DONG, on y est allé faire un tour. Tout était terminé. Donc, on est revenu, après avoir vu DENIZOT, à CHO BAHOM. Le Lt CARADEC est venu payer la solde, avec ALBIS et CLECH. Dans la soirée, avec le Lt HENRIOT, je suis allé, en Jeep, à TAN BUU. Rentrés à minuit.

 1-1-47: Premier de l'an. Visite officielle des notabilités du village, ainsi que des membres de la famille. Le père LEGER est arrivé, avec le camion de ravitaillement. Messe à 17 h 30. Dans la soirée, je suis allé en patrouille jusque AN LAC, quelques coups de feu ayant été tirés, dans cette direction, mais nous n'avons rien vu. Comme de bien entendu, LE PERE LEGER PARTICIPAIT  A CETE PATROUILLE! (Il n'a pas fini de nous étonner, celui-là !)

 2-1-47: Partis à 6 h 3O, ce matin, pour TAN BUU. Faisions partie du détachement GUILLET. Opération dès 7 h. Traversé le Song CHO DEM, sur un pont de bateaux, construit par BONNAVAL, dans la nuit. Nous sommes allés, ensuite à TAN NHUT, puis au confluent du RACH BA TA et du KINH SANG.

 Rien vu. Dommage. Rentrés par la piste de CHO DEM. Traversé le RACH TAM, sur une jonque réquisitionnée. A pied, jusque BINH DIEN, en raison du nombre de véhicules nécessaires pour 850 hommes au moins, dont la Légion. Ce soir, le Père LEGER nous est revenu, de BEN LUC. Au lit à 23 h 30.

 3-1-47: Journée passée presque entièrement  à BINH DIEN. Quelques renseignements intéressants sur TAN NHUT. Le père LEGER est toujours avec nous. Paperasses. Bientôt 2 h.

 4-1-47: Ce matin, PECASTAING m'annonçait que, d'après un renseignement, 3000  V.M. se préparaient à attaquer, SERIEUSEMENT, le pont, et le poste de BEN LUC. Ce renseignement a eu pour effet, d'agiter les hautes sphères. Une section du génie, à notre disposition, pour activer les travaux de défense du pont. Suis allé à BEN LUC, au début de l'après-midi, avec le Lt HENRIOT et le Cdt JOHNSON. Dans la soirée, OPAQUE m'ayant confirmé le renseignement de PECASTAING, de ce matin, ce soir, accompagné de DUGOUA et du Père LEGER, je suis allé, en jeep, plus un groupe de combat de BINH DIEN, à BEN LUC.

 NUIT DU 4 AU 5 JANVIER 47: Patrouille autour du pont, etc. Au retour, vers 22 h 30, patrouille, en jeep, dans le village de PHUOC LOI. A ce moment, on a entendu une fusillade au Nord. C'était le groupe de combat de BINH DIEN, qui venait d'être accroché, à 2 kms environ au Nord d'ici. Aussitôt, avec les 2 A. M. (Modèle COVENTRY), un groupe de combat de GODEN et le Lt HENRIOT, (qui avait sauté dans la jeep), nous sommes repartis vers le Nord.

  Une barricade de paille se trouvait sur la route. Après l'avoir franchie, nous sommes allés jusque BINH DIEN. (Une balle dans le camion de BINH DIEN). Vers 23 h, en route pour BEN LUC, dans l'ordre: 1ere A. M., la jeep, le groupe de combat de GODEN, sur camion, 2eme A. M..

 Avons enlevé la barricade de paille, y avons mis le feu, arrosé les environs, puis nous sommes repartis vers BEN LUC. Quelques kms après GODEN, au tournant de LONG PHU, nous sommes tombés dans une embuscade, DE TOUT PREMIER CHOIX (Deux mitrailleuses lourdes, servies par des Japonais, F. M., et autres armes automatiques). La 1ere A. M., PLEINS PHARES, a, tout de suite, neutralisé les deux mitrailleuses lourdes, en tuant les servants japonais.(SALE COUP POUR LE MORAL ADVERSE !) Les V. M. n'ont pu, à aucun moment, rejoindre la route sur laquelle nous étions, repoussés par un feu nourri, et des grenades quadrillées, qui ne nous faisaient pas défaut.

 Au bout de 20 minutes, notre garde du corps: RORPACH étant blessé, le Lt HENRIOT m'a demandé s'il m'était possible de l'évacuer, et qu'il restait pour commander nos éléments. Ayant réussi à mettre RORPACH, dans la jeep, demi-tour sur route, tous feux éteints bien sûr, mais la lune était claire, je l'ai ramené à 50 miles au poste de GODEN. Pas eu le temps de voir les traçantes qui, paraît il, nous accompagnaient.

 Aussitôt au poste, par fusées et par radio, j'ai demandé des renforts. Puis j'ai tiré un coup de 40 dans la direction de l'embuscade, un peu sur la droite, pas davantage, car le canon s'est enrayé. (Toujours quand il ne faut pas !) Le groupe de combat de BINH DIEN est arrivé rapidement, puis 6 A. M. et deux groupes de combat au bout de deux heures, le Lt DARDEAU peu après. Enfin huit autres groupes de combat, et l'ambulance.

 L'embuscade ayant sauté, au bout d'une heure de combat, tous ces renforts et l'ambulance, ont, eu la possibilité de foncer jusque BEN LUC. Le Lt HENRIOT n'était pas mécontent, d'avoir récupéré deux mitrailleuses lourdes, que les VM n'ont jamais pu atteindre, une fois neutralisées, et il m'a dit, que le coup de 40 était tombé en plein dans un bosquet occupé par les VM., non loin d'eux.

 Pendant ce temps, le pont a été défendu, pendant plus d'une heure, par cinq Européens, d'un côté et sept partisans de l'autre, contre des centaines de rebelles, qui n'ont pas pu détruire le pont. Simultanément, le poste de BEN LUC était, lui aussi, fortement pris à partie, mais PECASTAING veillait. Là aussi, les V. M. ont dû décrocher.

 En définitive, nous avons eu une femme de partisan tuée, un partisan, un tirailleur et un Européen (RORPACH), sérieusement blessés, trois autres blessés légers, mais le moral est plus formidable que jamais.

 5-1-47: Bien entendu pas dormi de la nuit, du fait que le Lt HENRIOT n'est rentré qu'à 5 h 30. Il est 6 h 30 maintenant, et le jour se lève.

 Tout à l'heure, on va essayer de récupérer des armes, que les V. M. ont peut- être, laissées sur le terrain. Trouvé un chargeur de F. M., des casques japonais et quelques cartouches. Dans l'après-midi, avec le père LEGER, je suis allé à BEN LUC (Messe d'enterrement de la femme d'un partisan). A partir de 20 h 30, deux A. M. sont arrivées en renfort.

 6-1-47: Réveil à 9 h 30. J'avais sérieusement besoin de récupérer. En fin d'après- midi, je suis allé chercher le Père LEGER, à TAN BUU. Un groupe de combat et deux A. M., sont   arrivés  en renfort à 21 h. Il est 2 h 30 maintenant. Aucun coup de feu, pour l'instant. Dans  l'après-midi, on a fait un tir de 50 coups de 25 pounders sur AP BA. PETIT est venu nous voir. Il repart en FRANCE, incessamment.

 7-1-47: Depuis avant-hier, nous avons un nouvel Aspirant: MARBOUTY. C'est lui qui devient Officier S. R. Journée, presque entièrement passée, dans les paperasses. Propositions de citations. Allocution pour la mort accidentelle de CONTRE. Dans la soirée, le Père LEGER a dit une messe pour le repos de son âme. Il est 3 h.

 8-l-47: Réveil plutôt pénible, ce matin, à 7 h. Remise de décorations.

 Ai reçu ma deuxième citation pour le motif suivant:" Officier Adjoint, animé d'un courage remarquable, et d'un constant mépris du danger. Véritable entraîneur d'hommes, dont il sait gagner la confiance, a toujours maintenu, très élevée, l'ardeur combative de sa section, dans toutes les opérations et interventions. Dans la nuit du 4 au 5 Janvier l947, alors qu'il se rendait en renfort, au pont de BEN LUC (COCHINCHINE) sérieusement attaqué, a largement payé de sa personne, au cours de l'embuscade dressée sur la route coloniale. L'ennemi, serrant de près, s'est dégagé, à plusieurs reprises à la grenade. Alors que plusieurs armes automatiques balayaient la route, s'est porté au secours d'un blessé et, sur l'ordre de son chef, l'a ramené seul, dans une jeep, montrant à tous les combattants, le chemin glorieux de l'obéissance et du dévouement." -Déjà cité. Cette citation comporte l'attribution de la Croix de Guerre des Théâtres d'Opérations Extérieurs, avec étoile d'argent. A quand la prochaine ?!

Cette citation, élogieuse, particulièrement longue, lue, sur le front des troupes, par le Lt-Cel  DURAND, a, par la suite, été, sérieusement écourtée, dans mes pièces matriculaires, pour le plus grand bonheur des secrétaires, chargés d'établir mes états signalétiques et des services !

 Décidément, je suis tombé dans un sous-quartier épatant. Le personnel des A. M., que l'on nous avait détaché, ne veut plus nous quitter. Espérons que nous le garderons un bon bout de temps. Il paraît, que c'est NGUYEN BINH en personne, qui dirigeait l'attaque de l'autre nuit. C'est réellement trop d'honneur !  MAIS QUEL ECHEC ! En tout cas, le Lt-Cel DURAND est enchanté.

 Cet après-midi, a eu lieu l'enterrement de CONTRE, et la remise de décorations de RORPACH, POULET, et du Tirailleur (Matricule 30). GETTO est venu faire un tour. Dans la soirée, un Lt de CHOLON est venu faire une patrouille jusqu'ici, avec 4 groupes de combat.

 9-1-47: Ce matin, je suis allé en patrouille, du côté de LONG CANG. Rien de spécial pour nous. Avons été obligés de passer par BINH CHANH, LONG TRACH, pour nous y rendre. Vu le Capitaine HERBELIN. MARBOUTY m'accompagnait. En fin d'après-midi, avons effectué un tir au 25 pounders, sur AN THANH, le Château de CAM, THANH HA et LONG DINH. Fin de soirée calme.

 10-1-47: A 8 h, ce matin, je suis allé à BEN LUC. En patrouille en LCVP, jusque BINH DIEN, après un arrêt à TAN BUU. Puis, de nouveau, patrouille de BINH DIEN à BEN LUC. Rentré à 18 h. Il est 2 h 30 maintenant: RAS.

 11-1-47: Réveil assez pénible. A partir de 9 h, le téléphone ne cessait pas de m'appeler. Dans la matinée, visite des nouveaux notables de LONG HIEP. Dans l'après-midi, tandis que le Lt HENRIOT est allé chercher les photos à SAIGON, visite de l'Assistante Sociale et du Dr RAYNAUD.

 Le Lt HENRIOT est arrivé, au moment où le Cdt CHANSON, accompagné d'un Lt, venait nous voir. Dans la soirée, tri des photos, puis paperasses. Pendant ce temps, une de nos patrouilles se promène (Avec les 2 A. M.), entre BINH DIEN et BEN LUC. Tout est calme en ce moment. L'attaque de l'autre nuit a coûté très cher aux VM. D'après des renseignements, une trentaine de rebelles seraient déjà morts des suites de leurs blessures.

 L'endroit où ils se trouvent, n'est pas confortable, pour recevoir des soins. Le tir de 25 pounders d'avant hier, nous a réservé quelques surprises. Deux VM ont été gravement blessés à AN THANH. Sur le RACH TRE, une pagode caodaïste a été pratiquement détruite. A THANH HA, deux buffles n'ont pas eu le temps d'avoir peur.

 12-1-47: Réveil aussi pénible que celui de la veille. Dans la matinée, visite du S/Lt DUFFAULT qui prend l'ancienne section CHERON, tenue actuellement par le Lt DARDEAU. Ai déjeuné avec le Lt HENRIOT, à CAN GIOC. CAU est en convalescence. Rentrés vers 19 h. A 21 h, avec le Lt HENRIOT, je suis allé en jeep, faire une patrouille dans le village. Deux coups de fusil nous ayant accueillis, nous avons arrosé les environs. (A la mitraillette).

 Revenus ici, avons appris que TAN BUU était attaqué. Un groupe de combat de BINH DIEN a été accroché à une barricade (Un tué de notre côté).

 DARDEAU est arrivé sur les lieux, peu avant nous. Ensuite, après avoir déblayé la barricade (Eléments de voie de chemin de fer retournés), avec les A. M., nous sommes repartis vers BEN LUC, tandis que DARDEAU et LAPEZE allaient vers TAN BUU. Avons rencontré une autre barricade importante, après le tournant de LONG PHU. Après avoir fait sauter l'obstacle, sommes arrivés sans encombre, chez PECASTAING et au pont. Deux A. M., en renfort, étaient arrivées.

 13-1-47: Mieux reposé ce matin. Dans la matinée, je suis allé faire un tour à BEN LUC. Dans l'après-midi, préparation d'un tir au 25 pounders, interrompue par une fusillade à l'Est d'ici. Rien de grave. Tir sur des fuyards. Effectué ensuite un tir de réglage, au profit de PHUOC VAN, qui, maintenant, est coupé de partout. Au début de la nuit, avec les A. M., suis allé au Pont de BEN LUC, pour évacuer un malade (Piqué par un scorpion !) Le RICM    (Régiment d'Infanterie Coloniale du Maroc), (Le plus décoré de France, avec un Régiment de la LEGION, solide référence !) commence à nous donner des coups de main. La gare de BEN LUC flambait       .

 Le sabotage VM continue. A 2 h nouvelle patrouille avec, comme itinéraire, GODEN, BINH DIEN, poste de BEN LUC, GODEN. RAS sur la route coloniale.

 14-1-47: Grasse matinée jusque 10 h. Puis, je suis allé en jeep, jusqu'à l'endroit où la piste de LONG TRACH à PHUOC VAN a été coupée. MESSAGEOT et CHEVALET ont déjeuné avec nous. Dans l'après-midi, je me suis occupé à équiper une nouvelle planchette de batterie. Nous avons perçu un nouveau canon de 25 Pounders. Notre poste devient une véritable forteresse ! Dans la soirée, je suis parti en patrouille, accompagné de MARBOUTY, avec un groupe de combat et 2 AM.: GODEN, BEN LUC, BINH DIEN, BEN LUC, GODEN. Un calme étonnant.

 15-1-47: Nuit excellente, très calme. Bien reposé ce matin. Planchette de batterie, mais elle ne sera terminée que demain. Vu BEAUGENDRE, cet après-midi. Avant la nuit, j'ai effectué un tir au 25 pounders, à 1 km environ, au Nord de BEN LUC, pour débloquer la circulation fluviale, arrêtée par les VM. Ils veulent jouer au petit soldat ! Tant pis ! A 22 h, je suis parti avec un groupe de combat, et les 2 AM, d'abord à BINH DIEN, puis à BEN LUC. La route coloniale est libre. Pas le moindre petit V.M. à l'horizon !

 16-1-47: A minuit 30, je suis reparti en patrouille, en jeep, avec le Lt HENRIOT, des bruits suspects ayant été entendus. Rien d'anormal. Ce matin, debout à 8 h. Paperasses dans la matinée et dans l'après-midi.

 Au pont de BEN LUC la femme de UT (Le chef de poste), a sauté sur une mine. Elle a été transportée à l'Hôpital, où elle ne tardera certainement pas à mourir. Dans la soirée, j'ai encore effectué deux tirs au 25 pounders, sur deux barrages VM sur le SONG BEN LUC (Signalés au cours de la journée). L'un des tirs avec le nouveau canon.

 17-1-47: A minuit, en route pour la patrouille habituelle sur la route coloniale. RAS. Les VM seraient-ils dégoûtés ? A BEN LUC, j'ai appris que quelques rebelles ont été blessés, au cours des tirs du l5. Malheureusement, il y a aussi des civils, dont le fils d'un grand chef caodaïste. C'est la guerre ! Debout à 10 h. Bien reposé. Puis, je suis parti en opération, avec PECASTAING et MARBOUTY. (AN LAC, CHO BAHOM: RAS).

 Le restant de la journée, je me suis occupé des canons. Il est ainsi des moments, où l'on redevient artilleur ! Dans l'après-midi, visite de BEAUGENDRE. De 21 h à 22 h 30, patrouille entre BINH DIEN et BEN LUC. Peu avant notre arrivée, quelques barques, qui tentaient de traverser le Song, ont été mitraillées par PECASTAING. A part cela, calme inquiétant. A 2 h, je repars avec nos bons chiens de garde, que sont nos AM !

 18-1-47: Partis à 2 h, en patrouille: itinéraire habituel. Rentrés à 3 h 30. RAS. Nuit excellente, fraîche même. A 7 h 30: alerte: Un camion civil venait d'être attaqué, au tournant de LONG PHU. Sommes partis immédiatement. Allés jusqu'à la gare de BEN LUC. Au retour, avec les AM, nous avons arrosé copieusement les alentours du tournant de LONG PHU.

 Aussitôt rentrés: au lit jusqu'à 13 h 15. Dans l'après-midi, je suis allé à PHUOC VAN avec le Lt HENRIOT. (En jeep). Au retour, un Lt des AM était ici. Le peloton mis à notre disposition va, paraît-il, être relevé, par un autre peloton. Entre 23 h et 0 h 15, patrouille habituelle avec les AM. Rien. Pourtant on s'attend à une autre attaque sur BEN LUC. Paperasses en rentrant.

 19-1-47: Ce matin, à 6 h, départ de la patrouille. A 8 h, arrivons à BEN LUC, trois minutes après un arrosage V. M. à la mitrailleuse. Grosse impression sur la population. Tiré sur de très nombreux fuyards.

 Aussitôt rentrés, tir au 25 pounders sur AN THANH Sud. Dans l'après-midi, visite de LAPEZE. RORPACH est à peu près rétabli. Il est même venu nous voir. SCHWEINMACKERS a été relevé ce matin. Dans la soirée, fortement escorté, je suis allé jusqu'à TANAN, voir où étaient nos nouvelles AM. L'attaque de BEN LUC, qui devait être déclenchée ce soir, n'a pas eu lieu.

 20-1-47: Rentrés vers 3 h. Les AM sont arrivées à 4 h. Casse croûte. Il va être 5 h. Au lit. Après quelques interruptions de sommeil, je me suis levé, vers midi. Avons maintenant un petit chat, tout ce qu'il y a de maigrelet ! Et de minuscule. Cette après-midi, nous avons fait une patrouille sur le Song BEN LUC. Moi, je suis resté, pour tirer au canon, au besoin. De 22 h à 24 h, patrouille avec les AM, jusque BINH DIEN, d'un côté, BEN LUC, poste et Pont de l'autre. Rien d'anormal.

 21-1-47: Nuit assez reposante, dans l'ensemble. J'ai même pu dormir sept heures, ce qui n'est pas mal. Matinée et après-midi au poste. Vu le Capitaine MARSCHALL. Je l'avais déjà vu, hier à TANAN. Avons pu lire aujourd'hui, une lettre du Colonel CHANSON, adressée aux jeunes officiers. Pas mal tournée cette lettre. (Toujours agréable d'avoir un chef qui nous comprend !) Ce soir, de 21 h à 22 h 30, patrouille habituelle avec les AM. On s'attend à quelque chose aujourd'hui, pour BINH DIEN et BEN LUC.

 22-1-47: Comme on s'attendait à quelque chose, évidemment, il ne s'est rien passé. Ce matin, à 4 h, départ de la patrouille: BINH DIEN comme d'habitude puis BEN LUC, où nous avons vu poindre le jour. Celui ci s'étant levé, sans le moindre incident, nous sommes rentrés à 7 h. J'ai ensuite dormi, comme un sonneur, jusque 11 h 30. Dans l'après-midi, tir de réglage au 25 Pounders, sur le pont de BEN LUC. Tout va bien, le canon n'était pas déréglé. Dans la soirée, encore un coup, avec pointage de nuit.

 23-1-47: Nuit très calme. Les VM devaient anéantir le poste et le pont de BENLUC AVANT LA FETE DU TET! Matinée passée dans les munitions. Dans l'après-midi, je suis allé au poste de BEN LUC. Un bruit anormal circule dans la population: Un nombre important de Japonais et de Légionnaires viendrait prochainement, se rendre à PECASTAING. Il est arrivé un coup dur sur la route MY THO -CAI LAY. Dans la soirée: lecture de journaux récemment arrivés de FRANCE.

 24-1-47: Encore une nuit calme de passée. Ce matin, je suis allé passer une inspection d'armes, à BINH CHANH. Dans l'après-midi, inspection d'armes à PHUOC VAN. De 22 h à 24 h, patrouille sur la RC 16, entre BINH DIEN et BEN LUC, comme d'habitude. Visite du Lt SANTINI et du Père COURTET.

 25-1-47: Nuit très calme. Ce matin, visite du Lt-Cel DURAND. L'avons accompagné, au pont de BEN LUC, puis à PHUOC VAN. Dans l'après-midi, et la soirée, suis resté au poste. Le Lt HENRIOT est allé à SAIGON aujourd'hui. Nos patrouilles font du bon travail. Quelques arrestations intéressantes.

 26-1-47: Nuit excellente. Dans la matinée, revue d'armes à TAN BUU. Rentré vers midi. Une assistante sociale (Mlle MARTIN) a déjeuné avec nous. Dans l'après-midi, tiré deux coups de 25 pounders. D'après les renseignements, il se révèle que la nuit du 4 au 5 janvier fut, non seulement un échec, mais une véritable catastrophe pour les VM. C'est peut-être ce qui explique le grand calme actuel, dans le sous-quartier. Lundi dernier (Le 20), je me suis brûlé la jambe, en montant sur une AM. (Tuyau d'échappement !). Je souffre encore aujourd'hui.

 27-1-47: Matinée passée à BINH DIEN, Ai déjeuné avec LAPEZE, puis, l'après-midi, je suis allé passer l'inspection d'armes à BIN TRI DONG. Vers 20 h, quelques coups de mortier, ont été tirés, sur le poste du pont de BENLUC. D'ici, on a riposté au 25 pounders, ce qui a eu pour effet, le silence immédiat.

 28-1-47: Nuit très calme, de tout repos. Ce matin, je suis allé à CHO BAHOM, d'où j'ai ramené DENIZOT. DUGOUA est parti hier d'ici, pour aller suivre un stage de 25 Pounders. Ce midi, PECASTAING et DENIZOT ont déjeuné avec nous. Les AM sont toujours à notre disposition. Dans l'après-midi, suis allé, avec le Lt HENRIOT, à BINH DIEN, et à CHO DEM.

 Le Cdt voulait savoir quel serait l'emplacement du 25 Pounders. (Le 3eme). Il paraît, que nous devons le toucher bientôt. Dans la soirée, de 23 h à 1 h, patrouille entre BINH DIEN et BEN LUC. Sous-quartier très calme.

 29-1-47: A part mon pied droit, qui m'a passablement fait souffrir, la nuit a été très calme. Matinée au poste. Au courant de l'après-midi, fausse alerte. Suis parti en jeep, avec MARBOUTY, sur la route, direction BINH CHANH, un arrêt suspect de la circulation, étant signalé, Rien d'anormal. Le Lt HENRIOT EST OFFICIELLEMENT CAPITAINE, POUR COMPTER DU 25-12-46. Bravo !

 Arrosage en perspective.

 3O-1-47: Bonne grasse matinée; Déjeuner à BINH DIEN. Le Capitaine HENRIOT, le Capitaine HERBELIN, le Capitaine JOBAS, PECASTAING, étaient là aussi. Rentrés à 19 h. Les dernières arrestations étaient réellement intéressantes.

 31-1-47: Occupations diverses au poste. Solde au début de l'après-midi. Ai appris ce soir que, demain, je dois me présenter à OPAQUE (Remplacement provisoire de l'adjoint à l'Officier S2 S3)

 1-2-47: Journée passée à CHOLON. Rentré ce soir à GODEN. Paperasses.

 2-2-47: Réussi à obtenir une journée entièrement libre. Déjeuné à BINH DIEN, chez LAPEZE. Joyeux repas, terminé par un exercice de tir, au revolver, à la mitraillette et à la mitrailleuse ! Un tour à SAIGON PALACE. Dans la soirée, patrouille pour ramener PECASTAING et LARAILLE.


 
 

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